(Ottawa) Le gouvernement Trudeau entend délier largement les cordons de la bourse fédérale dans son prochain budget afin de stimuler la construction de nouveaux logements.

Ce qu’il faut savoir

  • La valse des annonces prébudgétaires se poursuit.
  • Le gouvernement Trudeau compte investir 6 milliards de dollars pour construire les infrastructures essentielles au logement.
  • Ottawa compte imposer des conditions aux provinces.
  • Québec exige un droit de retrait avec pleine compensation.

Ainsi, il compte lancer un nouveau fonds doté d’une enveloppe de 6 milliards de dollars qui servira à construire et à mettre à niveau les infrastructures essentielles au logement comme l’approvisionnement en eau potable, les usines de traitement des eaux usées, les systèmes d’évacuation des eaux pluviales et la gestion des déchets solides.

Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé les détails de cette nouvelle mesure durant une conférence de presse à Halifax en compagnie du ministre fédéral du Logement, Sean Fraser. Cette annonce s’inscrit dans une nouvelle stratégie des libéraux de divulguer de grands pans du budget avant son dépôt à la Chambre des communes le 16 avril par la ministre des Finances, Chrystia Freeland. Jusqu’ici, M. Trudeau et ses ministres ont annoncé l’équivalent de 7,5 milliards de dollars de nouvelles mesures en quatre jours.

Dès cette année, la somme de 1 milliard de dollars provenant du Fonds canadien pour les infrastructures liées au logement sera mise à la disposition des municipalités pour répondre aux besoins les plus urgents en matière d’infrastructures qui freinent la construction de logements.

Le reste de l’enveloppe (5 milliards) fera l’objet de négociations entre Ottawa et les provinces et les territoires visant à établir leurs priorités à long terme. Mais les provinces et les territoires ne pourront pas toucher un cent de ce fonds s’ils ne s’engagent pas à prendre des mesures jugées essentielles pour accélérer la construction de logements.

Entre autres conditions, les provinces devront exiger des municipalités qu’elles autorisent la construction de plus de logements intermédiaires, comme des duplex, des triplex, des maisons en rangée et d’autres immeubles d’habitation sur leur territoire.

Parmi les autres, les provinces devront adopter des changements au Code national du bâtiment afin de soutenir des options de logement plus abordables et qui respectent l’environnement. Il faudra aussi utiliser le catalogue de conception de logements que le gouvernement fédéral rendra public sous peu.

Enfin, les provinces et les territoires devront mettre en œuvre les mesures de la nouvelle charte des droits des acheteurs et de la charte des droits des locataires.

Le gouvernement Legault a de nouveau fait savoir que la démarche proposée par Ottawa est inacceptable, comme il l’a signifié la semaine dernière quand M. Trudeau a fait d’autres annonces touchant les compétences des provinces. « Il n’est pas question pour le Québec de se plier à plusieurs conditions pour simplement obtenir sa juste part de cette enveloppe. Le Québec doit pouvoir se prévaloir de son droit de retrait avec pleine compensation et sans aucune condition », a fait savoir le ministre responsable des Relations canadiennes, Jean-François Roberge.

Ottawa compte fixer un échéancier serré pour s’entendre avec les provinces, soit au plus tard le 1er janvier 2025. Dans le cas des territoires, l’échéancier a été fixé au 1er avril 2025.

Le gouvernement Trudeau écarte l’idée d’accorder un droit de retrait avec pleine compensation. En effet, si une province ou un territoire ne signe pas une entente d’ici l’échéance prévue, les fonds qui lui sont alloués seront transférés au volet municipal.

« Nous avons besoin d’un plus grand nombre de logements abordables ainsi que des infrastructures sous-jacentes à ces logements. C’est pourquoi le budget 2024 prévoit la construction de plus d’infrastructures et de plus de logements ainsi que du soutien pour qu’encore plus de Canadiens puissent se trouver un chez-soi », a affirmé Justin Trudeau.

En plus de la création de ce nouveau fonds, le premier ministre a confirmé l’ajout de 400 millions de dollars dans le Fonds pour accélérer la construction de logements. Mis sur pied l’an dernier, ce fonds totalisera donc 4,4 milliards et vise à donner un coup de pouce financier aux municipalités qui réduisent les lourdeurs administratives pour accélérer la construction de logements.

Depuis la création de ce fonds, Ottawa a conclu des ententes directement avec 179 municipalités à travers le pays. Le gouvernement Trudeau a toutefois conclu une entente avec Québec dans le cadre de ce programme. Québec a obtenu 900 millions d’Ottawa et s’est engagé à investir une somme équivalente pour construire plus rapidement des logements.

En point de presse, Justin Trudeau a affirmé que la valse des dépenses qu’il annonce avec certains de ses ministres depuis quelques jours demeure une gestion prudente et responsable des fonds publics, même si cela risque d’augmenter le déficit.

« Laissez-moi rappeler aux Canadiens et aux journalistes que le Canada est dans la meilleure position fiscale de tous les pays du G7. On est la troisième plus grande économie du monde avec une cote AAA des agences de notation. On a la dette la plus basse par rapport au PIB du G7. On continue d’avoir une approche responsable. En même temps, on est en train de faire des investissements historiques pour que les gens puissent se payer un logement de façon raisonnable », a-t-il dit.