Pour avoir heurté un cycliste avec la voiture de son père une nuit d'automne 2017, et avoir poursuivi son chemin sans porter assistance au blessé, le fils de l'ex-ministre de la Santé Gaétan Barrette, Geoffroy, a été condamné cet après-midi à purger une peine de huit mois à domicile.

L'ancien ministre, toujours député du Parti libéral du Québec, accompagnait son fils, qui recevait sa sentence au palais de justice de Montréal. Il est resté impassible et n'a fait aucun commentaire.

Le soir du 12 octobre 2017, le jeune homme de 24 ans, qui travaille comme courtier immobilier, avait consommé de l'alcool au cours d'un souper au restaurant avec une dizaine d'amis. Peu après minuit, il prend la route au volant du véhicule de son père, qui était encore à ce moment ministre de la Santé, avec deux passagers.

Il suit la voiture d'autres amis, qui sont impliqués dans une « altercation verbale » avec un chauffeur de taxi, apprend-t-on dans l'exposé des faits, déposé au tribunal.

Les deux passagers de Geoffroy Barrette sortent alors pour se mêler à la discussion. « Tendu par cet incident et appréhendant un possible dérapage, monsieur Barrette connaît une anxiété intense et quitte les lieux pour se rendre chez lui », indiquent les documents judiciaires.

Peu de temps après, sur la rue Rachel, il frappe un cycliste à une intersection. Pris de panique, il s'arrête brièvement, fait marche arrière, fait un virage en « U », puis emprunte la rue Saint-Dominique à contresens, laissant le cycliste étendu sur la chaussée.

Des passants accourus pour aider le blessé notent cependant sa plaque d'immatriculation. Il sera arrêté quelques heures plus tard chez ses parents, avec qui il habite à Mont-Royal, et accusé de délit de fuite.

Pas de traitement de faveur

« C'est un acte criminel très grave, qui peut entraîner une peine de 10 ans de prison », a souligné la juge de la Cour du Québec Josée Bélanger, en rendant sa décision. Selon elle, la sentence et les conditions imposées reflètent cependant la gravité de l'infraction et tiennent compte du profil du jeune homme, qui a plaidé coupable.

Même s'il est le fils de l'ancien ministre de la Santé, Geoffroy Barrette « n'a pas eu de traitement de faveur. Il a reçu la même peine que n'importe quel autre citoyen qui aurait commis des crimes similaires », a affirmé la procureure de la Couronne, Geneviève Langlois, à sa sortie du tribunal.

Comme il est le fils d'une personnalité publique, il a toutefois dû composer avec l'intérêt des médias, ce qui peut constituer un élément dissuasif, a fait valoir son avocate, Nadine Touma.

Geoffroy Barrette n'a pas d'antécédent judiciaire, mais il a été intercepté à de nombreuses reprises au volant dans les dernières années, pour une série d'excès de vitesse et omissions de s'arrêter aux feux rouges, selon les archives judiciaires.

La peine de huit mois à domicile (d'abord 24 heures sur 24, sauf pour le travail, puis en respectant un couvre-feu) était une suggestion commune de la défense et de la couronne. Il lui est aussi interdit de conduire pendant deux ans.

La juge a ajouté une condition : l'interdiction de consommer de l'alcool pendant huit mois.

Pourtant, Me Nadine Touma a affirmé en cour que « la consommation d'alcool n'a pas contribué à la survenance de l'accident » et que « M. Barrette n'a pas eu de comportement téméraire ou dangereux au volant de son véhicule avant l'accident ».

En fait, il faut plutôt retenir que les policiers n'avaient pas de preuve quant au rôle que l'alcool aurait pu jouer dans l'accident ni de preuve de conduite dangereuse, a précisé la procureure de la Couronne.

Facture d'hôpital pour l'étudiant tchèque

Le cycliste frappé par Geoffroy Barrette a été légèrement blessé. L'étudiant au doctorat en physique à l'Université McGill, de nationalité tchèque, indiquait après l'accident qu'il avait dû payer de sa poche les frais médicaux de plus de 1000 dollars, en espérant obtenir un remboursement de la part de son assurance voyage en rentrant dans son pays. Il expliquait aussi que son vélo, dont il estimait la valeur à 1000 dollars, était une perte totale.

« Un délit de fuite démontre une extrême lâcheté. Je ne pourrais plus dormir si je faisais une telle chose. Je crois que cette personne devrait faire face à ses problèmes, cela rend plus fort. S'enfuir est pathétique », a écrit l'étudiant dans une déclaration.

Geoffroy Barrette, qui a exprimé ses regrets en plaidant coupable, s'est engagé à lui remettre 1000 dollars, un engagement qui fait partie de sa sentence.