Un homme qui a profité de la vulnérabilité de son amie, intoxiquée et quasi inconsciente, pour l’agresser sexuellement devra purger en prison sa peine de 12 mois de détention. Son crime est trop sérieux pour justifier l’imposition d’une peine de prison à domicile, estime la Cour d’appel du Québec.

Un résidant de Boucherville, Benoît Lemieux, a été reconnu coupable d’agression sexuelle en janvier 2021 au terme de son procès au palais de justice de Longueuil. Il contestait en appel le verdict de culpabilité et sa peine d’emprisonnement. La Cour d’appel du Québec a toutefois rejeté ses appels le 12 avril dernier.

L’homme de 43 ans s’en est pris à la victime pendant une fête organisée chez lui en 2018. L’accusé, la victime et le conjoint de celle-ci avaient consommé de la MDMA (ecstasy) pendant la soirée. Prise de tremblements et de nausées, la femme s’est étendue sur un lit avec l’aide de l’accusé. Elle frôlait alors l’inconscience.

« Prétextant vouloir se coucher pour se reposer, le délinquant en profite pour agresser sexuellement la victime. […] Il a profité de la vulnérabilité de la victime pour la caresser aux seins et à la vulve, et pour tenter de lui insérer son pénis dans la bouche dans le but d’obtenir une fellation », avait conclu le juge du procès. Le magistrat avait refusé d’accorder l’absolution à l’accusé.

Le sursis n’est pas automatique

Cette décision du plus haut tribunal de la province aborde pour l’une des premières fois le recours à l’emprisonnement avec sursis – aussi appelé « prison dans la collectivité » ou « prison à domicile » – depuis l’adoption du projet de loi C-5 à Ottawa. Cette modification majeure du Code criminel a ouvert la porte à l’attribution du sursis dans le cadre de tous les crimes, sauf pour de très rares exceptions (meurtre, torture, génocide).

Des peines de sursis accordées à des agresseurs sexuels ont créé la controverse dans les derniers mois. Une peine de 20 mois de prison à domicile imposée à un homme coupable d’agression sexuelle a eu des échos jusqu’à la Chambre des communes. Le procureur de la Couronne avait sévèrement critiqué Justin Trudeau pour ce « retour en arrière » en matière de peines.

Même s’il a été condamné avant le changement législatif, Benoît Lemieux était admissible à la prison à domicile en raison de ses processus d’appel.

Essentiellement, la Cour d’appel rappelle que le sursis ne peut être imposé en toutes circonstances. Dans le cas présent, l’incarcération s’impose, puisque les objectifs de dénonciation et de dissuasion doivent primer. Les facteurs aggravants sont en effet nombreux dans ce dossier.

« Parfois, la situation est tellement sérieuse, tellement grave, que ce type d’emprisonnement [avec sursis] ne suffit pas. C’est le cas ici », analyse le juge François Doyon.

La Cour d’appel sera certainement appelée dans les prochaines années à éclaircir le droit à ce sujet. Le juge François Doyon rappelle en effet que le changement législatif est « trop récent » pour identifier les jugements permettant de comparer l’attribution de l’emprisonnement avec sursis.