Un soi-disant bon Samaritain a été reconnu coupable d’avoir agressé sexuellement une femme en état d’ébriété dans la cage d’escalier des résidences de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) en 2018. Pour sa défense, l’agresseur s’est posé en victime de sa proie. L’Université assure avoir renforcé depuis la sécurité dans les résidences.

Haroun Cheikh Sidiya, un travailleur de l’informatique de 31 ans, n’en a toutefois pas fini avec la justice. Selon des documents obtenus par La Presse, il fait face à de graves accusations à Winnipeg : agression sexuelle, contacts sexuels et incitation à des contacts sexuels. Les gestes auraient été commis le 23 juin dernier sur la même victime âgée de moins de 16 ans.

Malgré la gravité des accusations, le Winnipegois a obtenu sa liberté sous de strictes conditions, dont celle de porter en tout temps un bracelet GPS à une cheville. Haroun Cheikh Sidiya était donc présent en personne le 16 septembre dernier au palais de justice de Montréal. Ces accusations n’ont pas été mentionnées en salle d’audience.

Un pur inconnu

L’agression est survenue le 13 septembre 2018, vers 4 h du matin, dans les résidences de l’UQAM de la rue Saint-Urbain, près de la rue Sherbrooke. Cette nuit-là, la victime retourne aux résidences avec une amie, après une soirée arrosée. Les deux femmes s’assoient dans le couloir des résidences pour permettre à l’amie de charger son téléphone. La victime, en état d’ébriété, s’allonge au sol.

Un pur inconnu, Haroun Cheikh Sidiya, les aborde en prétendant habiter aux résidences – ce qui était faux. Il propose de raccompagner la victime à sa chambre et de payer le taxi à l’amie. Dans l’ascenseur, il embrasse la plaignante, qui le repousse aussitôt. Puis, dans la cage d’escalier, l’agresseur essaie d’introduire sa main dans le pantalon de la victime et tente de le lui retirer. Il lui dit qu’il souhaite la « manger ». Mais la victime refuse.

Haroun Cheikh Sidiya – qui mesure plus de 6 pieds – tente de pousser la victime vers le bas en appuyant sur ses épaules avec les deux mains. La victime lui dit à plusieurs reprises « non », mais comme elle craint son agresseur, elle se met à genoux. L’assaillant sort alors son pénis et le lui introduit de force dans la bouche. Dès qu’elle réalise ce qui se passe, elle se lève, dit « non » plusieurs fois et court vers l’ascenseur pour rejoindre son amie. Les deux femmes, cachées dans une salle de bains, appellent la police, alors que l’agresseur continue de ratisser les étages.

Au procès, Haroun Cheikh Sidiya a soutenu que son objectif était seulement de porter assistance à deux inconnues en état d’ébriété. S’il se trouvait dans les résidences en pleine nuit, c’était selon lui pour rejoindre un ami afin d’aller courir sur le mont Royal.

L’ex-Montréalais a accusé la victime d’avoir amorcé les attouchements sexuels. Selon son récit, c’est la plaignante qui a fait sortir son pénis en voulant lui donner une fellation. Il a ainsi dû la repousser. Il a également dit qu’il se sentait « vulnérable » face à la plaignante, pourtant beaucoup plus petite que lui.

Le juge Salvatore Mascia a relevé de nombreuses « incohérences, invraisemblances et contradictions » dans le témoignage de l’accusé.

« Le Tribunal n’accorde plus aucune crédibilité à l’accusé qui essaie de parfaire sa version à chaque instant qu’il est interrogé, pour tisser une version arrangée sur mesure », tranche le juge.

A contrario, la victime a livré un témoignage « clair et cohérent », sans aucune « exagération ». Ses oublis sur des détails « périphériques » ne changent rien à sa crédibilité, selon le juge. « Rien ne vient entacher la crédibilité et la fiabilité de la version de l’agression donnée par la plaignante », conclut-il. Les vidéos de surveillance dans la résidence confirment d’ailleurs le récit de la victime.

MAnna Levin a mené ce procès pour le ministère public, alors que MIan Gemme a défendu l’accusé. La cause sera de retour en cour le mois prochain.

L’UQAM assure que de « nombreuses actions » ont été mises en place pour renforcer la prévention et la sécurité dans les résidences depuis 2018. « Le réseau de caméras de protection a été bonifié ; les accès avec lecteurs de carte ont été améliorés ; le système d’éclairage a été renforcé ; les effectifs de patrouille ont été augmentés ainsi que les rondes ; et des améliorations ont été apportées aux abords des résidences, dans le périmètre extérieur », a détaillé Jenny Desrochers, porte-parole de l’UQAM.