La tendance à la hausse du nombre de meurtres constatée à Montréal en 2021 pourrait se poursuivre cette année. Et tout comme l’an dernier, les homicides ayant pour toile de fond un conflit ou un règlement de comptes au sein du crime organisé sont les plus nombreux depuis le début de 2022.

Ce sont les deux principaux constats qui ressortent d’un bilan de mi-année des meurtres commis dans la métropole, dressé avec le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) à la demande de La Presse.

Entre le 1er janvier et le 30 juin (six mois complets), 13 homicides ont été commis à Montréal, contre 10 pour la même période en 2021.

L’année dernière a été la plus meurtrière depuis 10 ans à Montréal : en tout, 37 meurtres ont été commis en 2021, comparativement à une moyenne de 28 homicides au cours des 10 années précédentes.

Entre 2012 et 2020, le nombre de meurtres ayant pour mobile un conflit a fluctué entre 5 et 13, et le nombre d’assassinats motivés par un règlement de comptes, entre 6 et 8.

Mais en 2021, on a enregistré 25 meurtres sur 37 (67,5 %) dont le mobile était un conflit ou un règlement de comptes au sein du crime organisé. Cette année, en six mois, ces deux mobiles se profilent derrière 8 homicides sur 13, soit 61,5 %.

« C’est quand même une hausse marquée au niveau des règlements de comptes et des conflits. Déjà cette année, on a quatre règlements de comptes et quatre conflits, en plus des meurtres plus récents dont le mobile n’a pas encore été déterminé. Ça semble suivre la tendance que l’on voyait en 2021 », affirme Paul Verreault, commandant des Crimes majeurs du SPVM.

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Paul Verreault, commandant des Crimes majeurs du SPVM

Fait à noter, contrairement à ce que l’on pourrait croire, on n’a relevé aucun meurtre cette année qui aurait pour toile de fond un conflit entre gangs de rue, du moins pour le moment.

De jeunes victimes

On constate qu’au cours des dernières années, davantage de jeunes ont été victimes de meurtre à Montréal.

L’an dernier, trois adolescents ont été tués : Jannai Dopwell-Bailey, 16 ans, Thomas Trudel, 16 ans, et Meriem Boundaoui, 15 ans, dont le meurtre vient d’être résolu.

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Une femme se recueille près du lieu où Thomas Trudel, 16 ans, a été abattu par balle, en novembre 2021, dans le nord de Montréal.

On en compte deux cette année : Amir Benayad, 17 ans, tué par balle en janvier sur le Plateau Mont-Royal, et Lucas Gaudet, 16 ans, poignardé à mort à Pointe-Claire.

En 2021, 12 victimes de meurtre avaient entre 12 et 24 ans.

« Oui, il y a eu une tendance. Il y a des meurtres de jeunes qui ressortent un peu plus certaines années », confirme le commandant Verreault.

En 2020, le taux de résolution des meurtres par la division des Crimes majeurs du SPVM a été de 92 %, contre 62 % en 2021.

50 %

Pourcentage des meurtres de 2022 résolus jusqu’à maintenant

Cette baisse du taux de résolution des meurtres s’explique notamment par le fait que les enquêtes sont longues et que souvent, des homicides sont élucidés l’année suivante ou dans les années subséquentes

« En 2021, on a eu 16 règlements de comptes. Ce sont des dossiers dans lesquels on n’a pas de collaboration des témoins, alors c’est plus long pour avoir des résultats, mais on continue à avancer », explique Paul Verreault, dont les enquêteurs font face à la même situation cette année.

Le sentiment du devoir accompli

Il y a quelques jours, M. Verreault a annoncé son départ pour un autre corps de police après une longue carrière au SPVM, dont trois ans aux homicides et près de 10 ans dans la lutte contre le crime organisé.

De son passage aux homicides, il retient particulièrement la résolution, par ses enquêteurs et leurs collègues, des dossiers de Meriem Boundaoui, de l’agression contre le patrouilleur Sanjay Vig (affaire Camara) et du triple meurtre au quartier général du gang de rue des Profit Boyz dans le quartier Rivière-des-Prairies en août 2021.

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Impact de balle dans une fenêtre d’un immeuble de Rivière-des-Prairies à la suite d’une fusillade, en août 2021

Il souligne également les 27 opérations Filet qu’il a dirigées alors que ses enquêteurs tentaient de convaincre une personne en crise de ne pas mettre fin à ses jours.

« Durant mes années aux Produits de la criminalité, on a saisi plus de 60 millions en actifs et la moitié est allée aux programmes d’aide aux victimes, donc une aide indirecte. Mais revenir aux Crimes majeurs, cela m’a permis d’avoir une proximité avec les familles et un lien plus direct avec les résultats de notre travail », dit M. Verreault.

Dans son bilan, ce dernier déplore toutefois que le système judiciaire ne soit pas — toujours – adapté à la réalité des opérations policières.

« Ils nous fixent un cadre législatif et judiciaire, il faut le respecter, mais il y a des impacts sur le terrain et il y a une limite à ce que la police peut faire, dont les délais de comparution en 24 heures. C’est frappant, surtout en homicide ou dans d’autres dossiers complexes. On court partout pour essayer d’arriver, alors qu’il faut prendre le temps pour ne pas se tromper. Ça met une pression énorme sur nos équipes d’enquête », conclut le commandant Verreault.

Le nouveau patron des Crimes majeurs du SPVM est le commandant Jean-Sébastien Caron.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.

Les 13 meurtres de 2022 (de janvier à juin inclusivement)

Arme utilisée

  • Arme à feu : 7
  • Arme tranchante : 5
  • Inconnu : 1

Mobile

  • Conflit : 4
  • Règlement de comptes : 4
  • Drame familial : 2
  • Inconnu : 2
  • Santé mentale : 1

Nombre de meurtres à Montréal 

  • 2022 : 13 (au 30 juin)
  • 2021 : 37
  • 2020 : 25
  • 2019 : 25

Source : SPVM