La troisième, c’est la bonne. Après deux procès qui n’avaient pas été concluants, un ex-consultant informatique a finalement plaidé coupable lundi matin à une accusation de complot pour frauder la Ville de Montréal en détournant des millions de dollars il y a une quinzaine d’années.

Coupant court à son troisième procès, Benoit Bissonnette a admis avoir conclu une entente avec Gilles Parent, un fonctionnaire de la Ville, et avoir volontairement fermé les yeux sur le fait que celle-ci visait « inexorablement » à frauder la Ville entre décembre 2006 et septembre 2008. M. Parent a d’ailleurs déjà été jugé et condamné à six ans de prison pour fraude dans cette affaire.

Dans un résumé des faits déposé à la cour, l’ancien consultant Bissonnette admet avoir utilisé un prête-nom pour camoufler le fait que lui et le fonctionnaire Gilles Parent détenaient ensemble une entreprise baptisée FORTÉ.

Commissions cachées et détournements vers Hong Kong

FORTÉ a reçu 1 million de dollars en commissions illégales versées par des entreprises privées qui fournissaient des services informatiques à la Ville de Montréal, selon le résumé.

L’entreprise détenue conjointement par les deux hommes a aussi réussi à s’approprier 3,5 millions de dollars de fonds publics, qu’elle faisait transiger par Hong Kong, en bernant la Ville grâce à de la « préfacturation » pour des services inexistants et à la création de faux individus, dont un certain Chung Wok Wei, qui était payé alors qu’il n’existait même pas, toujours selon le document déposé en cour.

FORTÉ a finalement réussi à empocher 750 000 $ grâce à un stratagème qui lui permettait de faire travailler ses employés à la Ville et à facturer des honoraires professionnels, précise le résumé.

Longue saga judiciaire

Les observations sur la peine de Benoit Bissonnette auront lieu le 3 décembre prochain. Il s’agissait du troisième procès tenu pour juger l’ancien consultant depuis son arrestation en 2009 par l’escouade Marteau, intégrée depuis à l’Unité permanente anticorruption (UPAC). L’enquête sur la fraude liée aux services informatiques de la Ville de Montréal avait été baptisée projet Épaulard.

En 2015, Benoit Bissonnette avait été acquitté par un jury au terme d’un premier procès, mais la Cour d’appel avait annulé cet acquittement et ordonné un nouveau procès parce que le jury n’avait pas reçu les directives appropriées avant ses délibérations.

En 2020, un deuxième procès devant jury avait avorté parce qu’un procureur de la Couronne avait fait référence pendant l’interrogatoire d’un témoin à un document d’incorporation d’une entreprise à Hong Kong, alors que celui-ci avait été jugé inadmissible en preuve.

La poursuite était représentée par MMathieu Longpré et MMarie-Ève Lavoie, du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), alors que Benoit Bissonnette était représenté par MMarc Labelle.