Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a finalement présenté ses excuses à Mamadi III Fara Camara vendredi. L’homme qui a été faussement accusé d’avoir agressé un policier a également été complètement disculpé par le SPVM. Plus tôt dans la journée, la Fraternité des policiers et policières de Montréal avait tiré à boulets rouges sur Valérie Plante, l’accusant d’ingérence politique parce qu’elle a déclaré l’homme innocent dès jeudi.

S’appuyant sur des résultats d’expertise de laboratoire, le directeur du SPVM, Sylvain Caron, a déclaré vendredi être prêt à disculper Mamadi Camara et à lui présenter ses excuses.

« Mes excuses, je tiens à les lui offrir publiquement comme je m’étais engagé à le faire [jeudi] », a-t-il déclaré lors d’une courte allocution aux médias. « Je veux que les Montréalaises et les Montréalais sachent qu’il n’a rien à se reprocher. »

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Mamadi Camara

La veille, le directeur du SPVM s’était déclaré prêt à s’excuser « au moment opportun » auprès de M. Camara, qui a été emprisonné pendant six jours avant de voir retirer toutes les accusations qui pesaient sur lui mercredi dernier.

Sylvain Caron a également affirmé avoir pris une entente pour rencontrer personnellement M. Camara dans les prochains jours « pour lui offrir [ses] excuses les plus sincères à sa famille et à lui pour tous les inconvénients liés aux malheureux évènements des derniers jours ».

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Mamadi III Fara Camara et sa conjointe, mercredi

L’avocat de M. Camara a déclaré que son client et lui étaient « extrêmement soulagés » de la tournure des évènements.

On est très contents, mais M. Caron a beaucoup de travail à faire parce qu’il y a eu des défaillances majeures dans ce dossier.

Me Cédric Materne, avocat de Mamadi III Fara Camara, en entrevue avec La Presse

Sur Twitter, vendredi, la mairesse Valérie Plante a tenu à réitérer les excuses de la Ville à M. Camara. « Redoublons les efforts pour trouver le ou les fautifs de l’attaque envers un agent du SPVM et faisons la lumière sur ce qui s’est passé », a-t-elle poursuivi.

« Il faut faire toute la lumière sur ce qui s’est passé. Mes pensées accompagnent M. Camara ainsi que le policier blessé », a affirmé le premier ministre Justin Trudeau en point de presse, vendredi.

La Fraternité attaque la mairesse

Plus tôt dans la journée, dans une lettre adressée à la mairesse, la Fraternité des policiers et policières de Montréal l’a accusée de faire de « l’ingérence politique » dans une enquête policière en cours parce qu’elle avait soutenu jeudi que M. Camara était un homme « libre et innocent ».

« Sur le plan des principes les plus élémentaires, il était sidérant de vous entendre, en plein point de presse, présumer des conclusions d’une enquête de police complexe, délicate, et surtout, encore intensément active. Il était également surréel de vous entendre réclamer une enquête neutre tout en énonçant vos propres conclusions », écrit le président de la Fraternité, Yves Francœur.

Valérie Plante avait aussi soutenu jeudi que la population « [était] en droit de se poser des questions » sur la présence de profilage racial dans cette affaire, que la Ligue des Noirs voit comme un autre exemple de racisme systémique.

Pour la Fraternité des policiers et policières de Montréal, cette évocation du profilage racial est « une allusion extrêmement déplorable ».

« Malheureusement, elle ne fait que s’inscrire dans votre tendance, en cette matière, à tenir des propos insidieux et à attiser des perceptions négatives à l’égard de vos policiers et policières. Ce faisant, vous jetez de l’huile sur le feu, nuisez au climat social et compliquez encore davantage la tâche de ceux et celles qui ont la responsabilité d’assurer la sécurité des Montréalaises et des Montréalais », déplore Yves Francœur, en s’adressant directement à Valérie Plante.

« Nous espérons que vous saurez dorénavant vous comporter de façon plus responsable en évitant que vos biais idéologiques n’interfèrent avec votre nécessaire devoir de réserve », conclut M. Francœur, en demandant à la Ville de porter une « attention particulière » à sa lettre.

Le cabinet de la mairesse a réagi en tentant de calmer le jeu. « La mairesse a souligné lors de son point de presse le travail des 5000 policiers et policières de la Ville de Montréal, comme elle le fait depuis le début de son mandat. Il est important de rappeler que nous avons tous une responsabilité collective d’assurer la confiance de la population montréalaise envers notre corps de police », a souligné l’attachée de presse Geneviève Jutras.

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La mairesse Valérie Plante, lors de son point de presse de jeudi

Cette dernière rappelle que la Ville a déjà réclamé « une enquête neutre afin de faire la lumière sur le processus qui a mené à l’arrestation et la détention pendant six jours et cinq nuits de M. Camara, un citoyen montréalais, tout comme l’ont aussi demandé la ministre de la Sécurité publique du Québec et le premier ministre du Canada ».

Cette attaque de la Fraternité contre la mairesse s’ajoute à une relation déjà compliquée entre l’administration Plante et le directeur de son service de police.

Selon nos informations, le directeur du SPVM serait davantage en contact avec la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, avec qui il aurait discuté jeudi d’une enquête possible sur les évènements qui ont mené à l’arrestation et à la libération de Mamadi III Fara Camara.

Une voiture découverte dans l’arrondissement de LaSalle

Le SPVM a annoncé vendredi avoir retrouvé une voiture volée dans le stationnement d’un immeuble d’appartements dans l’arrondissement de LaSalle. Il pourrait s’agir du véhicule utilisé par une « tierce personne » impliquée dans l’agression du policier à Parc-Extension.

« Nos démarches d’investigation sont en continu depuis jeudi dernier pour trouver la vérité sur ce qui s’est réellement passé », a expliqué l’agente Caroline Chèvrefils en entrevue avec La Presse.

Selon nos informations, le véhicule retrouvé est de marque Hyundai, modèle Elantra de couleur rouge.

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Une voiture volée retrouvée dans l’arrondissement de LaSalle pourrait avoir été utilisée par l’agresseur du policier Sanjay Vig.

« Nos agents vont aussi perquisitionner le véhicule pour qu’une expertise soit éventuellement pratiquée sur celui-ci. Par la suite, d’autres possibles perquisitions pourraient survenir », a indiqué Mme Chèvrefils. La voiture a été remorquée par le SVPM en fin d’avant-midi, vendredi.

Des recherches seront aussi effectuées par les enquêteurs pour trouver les bandes vidéo des caméras de surveillance situées à proximité.

Selon le concierge de l’immeuble résidentiel, qui a souhaité conserver l’anonymat dans le contexte actuel, le véhicule en question était stationné à cet endroit depuis le jeudi 28 janvier, soit le jour de l’attaque initiale survenue contre l’agent Sanjay Vig, du SPVM.

L’homme en question a aussi expliqué à La Presse que le conducteur de l’automobile n’était pas un locataire de l’immeuble.

Cette « tierce personne » aurait par ailleurs pris la fuite à pied, après avoir laissé sa voiture dans le stationnement, en piquant rapidement vers un autre terrain situé à proximité. Les caméras de surveillance montreraient un homme noir.