(Montréal) L’ex-entraîneur de ski Bertrand Charest a peut-être eu un procès, mais il n’a pas été jugé selon la loi, a fait valoir son avocat devant la Cour d’appel, mardi matin.

L’homme y a contesté son verdict de culpabilité et la peine qu’il a reçue pour des agressions sexuelles commises sur de jeunes athlètes, alors que la Couronne juge que la peine de pénitencier de 12 ans dont il a écopé est adéquate, considérant la gravité de ce qu’il a fait.

La Cour d’appel a pris l’affaire en délibéré. Elle fera connaître sa décision plus tard.

Bertrand Charest n’était pas obligé d’être présent en Cour mardi et il ne s’est pas déplacé.

En juin 2017, le juge Sylvain Lépine de la Cour du Québec l’a déclaré coupable de 37 chefs d’accusation pour des actes de nature sexuelle posés dans les années 1990 sur neuf athlètes. Il avait notamment eu des relations sexuelles complètes avec certaines des adolescentes, alors qu’il était en position d’autorité sur elles. L’une d’entre elles est devenue enceinte et Charest l’avait amenée se faire avorter.

Ce jugement est truffé d’erreurs, a plaidé mardi matin l’avocat de Charest, Me Louis Belleau. Il a même parlé d’un « dysfonctionnement » du système de justice.

« Le juge du procès s’est trompé sur des choses assez graves et cela affecte la validité du jugement », a résumé le procureur devant les journalistes, après l’audition.

Il a donné en exemple les conclusions du juge Lépine sur les agressions sexuelles. « Il y a des fautes sur la façon d’analyser le consentement. C’est une question fondamentale », a-t-il dit.

« Des plaignantes ont dit en cour avoir consenti aux relations sexuelles, alors il fallait analyser si ce consentement était valide ou non », a expliqué Me Belleau, qui a parlé d’une « démarche défectueuse » du juge du procès.

Le procureur de la Couronne ne voit pas les choses de la même façon : les jeunes athlètes ont été manipulées et contrôlées, et ainsi amenées à donner leur accord. Elles ont consenti aux relations sexuelles en raison d’abus de confiance ou d’abus d’autorité, a plaidé Me Alexis Marcotte Bélanger.

Me Belleau a signalé d’autres erreurs : son client a été déclaré coupable de contacts sexuels sur des mineures alors que l’âge de certaines plaignantes au moment des infractions n’avait pas été établi devant le juge.

Au sujet de l’avortement subi par une adolescente, il a plaidé qu’il n’y avait pas de preuve que son client était responsable de cette grossesse. On n’a pas demandé à cette plaignante si elle avait eu des relations sexuelles avec quelqu’un d’autre, a souligné Me Belleau, selon qui « il y a un trou dans la preuve ».

Avant même l’audition en Cour d’appel mardi, la Couronne avait concédé que 20 des 37 chefs sur lesquels Charest a été déclaré coupable devaient tomber, pour diverses raisons, dont une absence de preuve sur certains chefs et aussi, une absence de juridiction du juge dans le cas d’une agression qui se serait déroulée en Nouvelle-Zélande.

« Des concessions qui semblent importantes au niveau du nombre, mais qui, en réalité, n’ont pas beaucoup d’impact sur le dossier », soutient le procureur de la Couronne.

Pour Me Belleau, si ces 20 chefs sont retirés, cela devrait nécessairement amener une réduction de la peine.

Mais pas selon le procureur de la Couronne : la peine devrait quand même être de 12 ans, soutient Me Marcotte Bélanger. « Le portrait global, ce qui est reproché à M. Charest, est inchangé », a-t-il dit. Le juge a correctement évalué la peine, a-t-il ajouté.

Bertrand Charest a passé environ quatre ans en prison, à partir de son arrestation en 2015. Il avait été remis en liberté en mars dernier, dans l’attente du résultat de son appel.