Ce n’est pas tous les jours qu’on croise une athlète comme Pamphinette Buisa.

D’abord, parce qu’en ces temps de pandémie, on ne la croise pas vraiment, dans le cas qui nous occupe ; la joueuse de rugby nous parle plutôt par l’entremise de l’écran en direct de la chic ville qu’elle habite, celle de Victoria, en Colombie-Britannique. Mais peu importe.

Même si elle est à des kilomètres et en virtuel, cette jeune femme de 24 ans rayonne avec la vigueur d’une flamme que l’on pourrait qualifier d’olympique, et ça tombe bien puisque ces jours-ci, justement, Pamphinette Buisa se prépare pour les Jeux de Tokyo. Là où elle marchera avec ses collègues de l’équipe canadienne féminine de rugby. « Si tout va bien », tient-elle à préciser.

Si tout va bien, oui, parce que la dernière année n’a été facile pour personne. Pamphinette s’est demandé, souvent, si elle allait pouvoir un jour remettre ses chaussures de rugby, à cause de cette pandémie qui n’en finit plus de finir.

C’est sans compter les dates des matchs reportés, puis reportés encore, sans qu’on sache bien s’ils allaient finir par avoir lieu. Ça use, tout ça.

« On est allées à Dubaï en avril pour un tournoi préparatoire en vue des Jeux, ajoute-t-elle. On a pu jouer contre la France, le Japon, les États-Unis. On y a disputé deux tournois et on a gagné le premier… C’était le test pour nous. Parce que ça faisait longtemps ; avant ça, je crois que ça faisait un an qu’on n’avait pas disputé de match à l’extérieur du Canada. »

La pandémie a forcé les gens, dans bien des cas, à réinventer un peu leur vie, à se trouver de nouvelles passions. Il y en a qui ont fait du pain, des meubles, des casse-tête. Pamphinette Buisa, elle, a décidé de faire du bien.

Quand les Jeux de Tokyo ont été reportés l’an passé, je ne savais pas trop quoi faire. Quand on passe son temps à s’entraîner, à ce niveau, on est un peu dans une bulle. Ça nous a un peu forcés à voir autre chose…

Pamphinette Buisa

Pamphinette Buisa a vu autre chose, en effet. Elle a vu des inégalités sociales. Elle a vu de la pauvreté. Elle a vu des gens dans le besoin. Elle a vu des causes, plusieurs causes, qui l’ont interpellée dans son coin de pays.

Elle a surtout vu un monde qu’elle désirait changer un peu.

« Je travaillais ici, à Victoria, dans un hôtel qui est devenu un centre pour les sans-abri pendant la pandémie. Pour moi, ç’a été l’occasion d’écouter ce que ces gens-là avaient à dire. Ce qu’on a pu voir à l’hôtel, c’était beaucoup de problèmes de drogue, de pauvreté. Ça m’a donné une perspective différente. J’ai senti l’importance d’avoir cette curiosité, de pouvoir aider les autres, de pouvoir écouter les gens. »

PHOTO CHAD HIPOLITO, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Pamphinette Buisa au square Bastion à Victoria, en Colombie-Britannique

En juin 2020, elle a pris part à une manifestation du mouvement Black Lives Matter dans les rues de Victoria, où des milliers de personnes ont défilé pour protester contre les inégalités raciales. Elle ne l’a pas fait tant par choix que par nécessité. « Il faut se servir de sa voix pour aider », ajoute-t-elle.

Tout cela n’est peut-être pas si étonnant. Quelques minutes de conversation avec elle suffisent à nous rappeler que Pamphinette Buisa ne se contente pas de pourchasser un ballon de rugby dans la vie. Elle pourchasse aussi des rêves, ses rêves, et c’est avec une fierté évidente qu’elle nous rappelle qu’elle étudie les sciences politiques à l’Université de Victoria. « Avec une mineure en justice sociale, précise-t-elle. Il me reste un an… »

Pour cette native d’Ottawa, née d’un père nommé Pamphile et d’une mère nommée Jeannette (d’où son prénom), l’avenir sera reluisant, sans l’ombre d’un doute. Tant sur le terrain qu’à l’extérieur.