(Téhéran) Le groupe djihadiste État islamique (EI) a revendiqué jeudi, alors que l’Iran observait une journée de deuil national, l’attentat dans le sud du pays qui a fait la veille 84 morts, près de la tombe du général Qassem Soleimani, ex-architecte des opérations militaires iraniennes au Moyen-Orient.

La double explosion est survenue dans un contexte régional très tendu depuis le début du conflit le 7 octobre entre Israël et le Hamas, et au lendemain de l’élimination d’un haut responsable de ce mouvement islamiste palestinien dans une frappe près de Beyrouth, attribuée à Israël.

L’EI a indiqué via ses chaînes Telegram que deux de ses membres avaient « activé leur ceinture explosive » au milieu « d’un grand rassemblement d’apostats, près de la tombe de leur leader “Qassem Soleimani” hier à Kerman, dans le sud de l’Iran ».

Une foule y était rassemblée pour commémorer la mort du général, tué en janvier 2020 par une frappe américaine en Irak et célébré en Iran pour son rôle dans la défaite de l’EI.  

Les funérailles publiques des victimes, prévues vendredi, ont été « annulées par décision » des autorités, a par ailleurs affirmé le gouverneur de Kerman à l’agence de presse Tasnim, précisant que les victimes seront inhumées « uniquement en présence des familles ».

Jeudi, le ministre de l’Intérieur, Ahmad Vahidi, a aussi indiqué à l’agence locale Isna que la sécurité serait renforcée aux frontières poreuses avec l’Afghanistan et le Pakistan, points de passage pour des groupes armés combattant le pouvoir iranien.

Plus tôt dans la journée, l’agence officielle Irna avait cité « une source informée », indiquant que la première déflagration avait été provoquée par un kamikaze, un homme, dont le corps avait été déchiqueté. Pour la seconde, l’enquête se poursuit mais il s’agissait très probablement également d’un kamikaze, a ajouté Irna.  

« Réponse sévère »

En Iran, des responsables avaient avant la revendication de l’EI aussitôt pointé du doigt Israël et les États-Unis, un conseiller politique du président iranien, Mohammad Jamshidi, accusant les « régimes américain et sioniste » d’être derrière l’attentat.

Le département d’État américain avait jugé « absurde » toute suggestion d’une implication des États-Unis ou d’Israël, un haut responsable américain s’exprimant sous couvert d’anonymat jugeant lui que l’attaque ressemblait « au genre de chose » faite par l’EI « par le passé ».  

Un premier bilan de plus de 100 morts a été revu à la baisse jeudi par le chef des services d’urgence du pays, Jafar Miadfar, qui a fait état de 84 personnes tuées et 284 blessées.

Cette attaque est la plus meurtrière dans le pays depuis 1978, quand un incendie criminel avait fait au moins 377 morts dans un cinéma d’Abadan, selon les archives de l’AFP.

Ennemi juré de l’Iran, Israël n’a pas commenté l’attentat. « Nous sommes concentrés sur les combats avec le Hamas » dans le territoire palestinien de la bande de Gaza, a indiqué le porte-parole de l’armée israélienne, Daniel Hagari.

Le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, avait promis avant la revendication de l’EI une » réponse sévère « à cet acte, le président Ebrahim Raïssi annulant un déplacement prévu jeudi en Turquie, selon un média d’État.

PHOTO ATTA KENARE, AGENCE FRANCE-PRESSE

Ebrahim Raïssi

Condamnations internationales

La première explosion s’est produite à 700 m de la tombe du général Soleimani, la seconde un kilomètre plus loin, selon des sources iraniennes.

Le Conseil de sécurité des Nations unies a condamné jeudi « avec force la lâche attaque terroriste ». « Le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations constitue l’une des plus dangereuses menaces à la paix et la sécurité internationales », ont réaffirmé ses membres.  

Le mouvement islamiste palestinien Hamas, soutenu par Téhéran, a lui fustigé un « acte terroriste » qui « cherche à déstabiliser la sécurité de la République islamique au service de l’agenda de l’entité sioniste [Israël] ».

La Syrie a exprimé « son entière solidarité face aux attaques terroristes et aux complots honteux » visant, selon elle, son allié iranien.

Le président russe, Vladimir Poutine, a dénoncé un attentat « choquant par sa cruauté et son cynisme ».

Le secrétaire général de l’ONU, l’Union européenne, la France, l’Allemagne, la Jordanie, et l’Arabie saoudite ont également condamné l’attaque.