(Damas) Le président iranien Ebrahim Raïssi a estimé mercredi à Damas que la Syrie de Bachar al-Assad avait « remporté la victoire », dans un pays déchiré par une guerre civile depuis 12 ans et dont Téhéran est l’un des principaux alliés.

M. Raïssi s’exprimait à l’occasion de la première visite en Syrie d’un président iranien depuis 2010, dans un contexte de réchauffement diplomatique dans la région.

« Le gouvernement et le peuple syriens ont traversé de grandes difficultés, et aujourd’hui, nous pouvons dire que vous avez surmonté tous ces problèmes et remporté la victoire malgré les menaces et les sanctions qui vous ont été imposées », a déclaré M. Raïssi lors d’une rencontre avec M. Assad.  

Le président Assad a de son côté estimé que « durant les périodes difficiles », les relations syro-iraniennes étaient « stables et constantes, malgré les graves tempêtes politiques et sécuritaires qui ont frappé le Moyen-Orient ».

« Quand la guerre contre la Syrie a été déclenchée il y a 12 ans, l’Iran n’a pas hésité à offrir un soutien économique et politique total et même à offrir de son sang », a-t-il ajouté.

Grâce à ses alliés russes et iraniens, le régime syrien contrôle aujourd’hui la majorité des territoires perdus depuis le début du conflit en 2011. En dépit d’une nette baisse de l’intensité des combats depuis 2019, les armes ne se sont pas totalement tues.

La visite de M. Raïssi, accompagné du chef de la diplomatie et de cinq autres ministres iraniens, se déroule sur fond de dégel des relations entre deux poids lourds du Moyen-Orient, l’Arabie saoudite et l’Iran.

Et selon les médias officiels, les deux présidents ont signé un protocole d’accord pour un plan de coopération stratégique dans plusieurs domaines, notamment l’agriculture, les chemins de fer, l’aviation civile, le pétrole et les zones franches.

Sayyida Zeinab

Le président iranien s’est également rendu au tombeau de Sayyida Zeinab, lieu de pèlerinage chiite important, dans la banlieue sud-est de Damas, où il a été accueilli au milieu de youyous et de chants en langues arabe et persane.

« La Syrie a résisté pendant douze ans et a gagné, et aujourd’hui nous célébrons la victoire ensemble près du sanctuaire de Sayyida Zeinab », a-t-il clamé devant une foule importante.

La relation entre l’Iran et la Syrie « n’est pas seulement une relation politique et diplomatique, mais aussi une relation de cœur entre deux nations et une relation stratégique entre deux gouvernements ».

M. Raïssi a en outre salué les familles de combattants prorégime « morts en martyr » présents sur place, selon la chaîne du Hezbollah libanais pro-iranien, Al-Manar.

Dès le début du conflit en 2011, Téhéran a envoyé des militaires présentés comme des conseillers, en soutien à l’armée syrienne. Plusieurs d’entre eux ont été tués dans des frappes israéliennes.

L’Iran soutient des groupes étrangers, comme le Hezbollah, qui ont combattu aux côtés des forces gouvernementales syriennes.  

« Reconstruction »

Le porte-parole du gouvernement iranien, Ali Bahadori Jahromi, a affirmé que ce voyage revêtait une « importance stratégique » pour les deux pays et que son objectif était d’ordre « économique ».

Depuis 2013, l’Iran a aussi ouvert des lignes de crédit notamment pour garantir les besoins en pétrole de la Syrie, frappée par un embargo international.

Damas et Téhéran ont en outre signé des accords bilatéraux début 2019 dans plusieurs domaines, dont l’un portant sur l’inauguration de nouveaux ports dans les villes syriennes de Lattaquié et Tartous.

« La partie iranienne s’est fortement présentée comme un contributeur à la phase de reconstruction », a expliqué à l’AFP l’analyste politique syrien Oussama Dannoura.

Le rapprochement inattendu entre l’Arabie saoudite et l’Iran bénéficie au président Assad, qui s’efforce de mettre fin à plus d’une décennie d’isolement diplomatique. Plusieurs capitales arabes longtemps hostiles au régime de Damas, notamment Riyad, ont récemment renoué avec lui, en particulier après le tremblement de terre dévastateur de février.

La visite de M. Raïssi « est devenue plus adéquate après la réconciliation saoudo-iranienne » qui « a eu un impact sur tous les foyers de tension existant encore » dans la région, souligne Oussama Dannoura.

Le dernier président iranien à s’être rendu à Damas est Mahmoud Ahmadinejad, en septembre 2010, avant la guerre en Syrie qui a fait plus d’un demi-million de morts.

M. Assad s’était lui rendu en Iran en mai 2022, pour la deuxième fois depuis le début de la guerre.