Le secrétaire d'État américain Rex Tillerson est arrivé mardi au Pakistan, qu'il va tenter de convaincre de lutter plus activement contre les groupes insurgés actifs sur son territoire et en Afghanistan voisin, où il s'était rendu lundi.

M. Tillerson, dont c'est la première visite à ce poste, a atterri vers 15h40 locales (5h40 à Montréal) à l'aéroport de Rawalpindi, la ville garnison adjacente à la capitale Islamabad, d'après le Département d'État américain.

Sa visite intervient sur fond de vives tensions diplomatiques entre les deux pays après que le président américain Donald Trump eut accusé en août Islamabad de jouer un double jeu en Afghanistan et d'abriter sur son sol des «agents du chaos».

Le Pakistan a depuis reçu des «requêtes très spécifiques» pour limiter les soutiens dont bénéficient les talibans et d'autres groupes armés sur son sol, a révélé Rex Tillerson lors de sa visite surprise en Afghanistan lundi.

«Nous voulons coopérer étroitement avec le Pakistan pour créer un environnement plus stable et plus sûr, au Pakistan même», a-t-il alors souligné.

Mais il s'agit de la part des États-Unis «d'un engagement sous conditions»: Islamabad «doit avoir une vision claire de la situation (...), du nombre de groupes terroristes qui ont pu trouver asile chez lui», a-t-il insisté.

Le secrétaire d'État, premier haut responsable de l'administration Trump à se rendre au Pakistan, doit y rencontrer le premier ministre Shahid Khaqan Abbasi, ainsi que le chef de la puissante armée pakistanaise, le général Qamar Javed Bajwa. Il devrait poursuivre sa tournée régionale en s'envolant pour l'Inde dans la soirée.

En Afghanistan lundi, M. Tillerson a rencontré le président Ashraf Ghani sur la base américaine de Bagram.

Les deux hommes ont évoqué la nouvelle stratégie du président Trump, qui prévoit l'envoi de renforts à hauteur d'environ 3000 hommes, en plus des 11 000 Américains déjà déployés, pour encadrer et former les forces afghanes.

200 morts en 5 jours

Cette rencontre a été à l'origine d'une polémique, la photo immortalisant l'entretien ayant semble-t-il été retouchée par Kaboul. Derrière les deux hommes, une horloge digitale, présente sur les clichés envoyés par les autorités américaines a disparu des photos de la présidence afghane.

Sept attaques et attentats se sont produits en cinq jours dans ce pays en guerre désormais depuis près de 38 ans, faisant plus de 200 morts parmi les forces de sécurité et les fidèles d'une mosquée de Kaboul.

De son côté, le Pakistan dément de longue date les accusations américaines et accuse Washington d'ignorer les milliers de vies pakistanaises perdues dans la lutte contre le terrorisme.

La relation entre les États-Unis et le Pakistan est particulièrement tendue depuis 2011 après le feu vert donné par Barack Obama à l'opération qui a conduit à la mort d'Oussama Ben Laden à Abbottabad, une ville de garnison pakistanaise proche d'Islamabad.

Ces dernières semaines ont été marquées par la libération par l'armée pakistanaise d'une famille américano-canadienne retenue en otage grâce à des renseignements américains, saluée par M. Trump comme une manifestation de «respect» du Pakistan pour son pays.

Cet épisode a lui-même été suivi d'une série de frappes de drones américains contre des membres du réseau Haqqani, allié des talibans et accusé d'avoir détenu la famille nord-américaine dans la zone frontalière entre Pakistan et Afghanistan.

Le ministre américain de la Défense, Jim Mattis, avait laissé entendre début octobre que des sanctions financières pourraient être prises à l'encontre du Pakistan, évoquant «des efforts en cours au département d'État et au département du Trésor».

Il avait aussi suggéré que le Pakistan pourrait perdre son statut d'allié des États-Unis hors OTAN. Accordé à 16 pays, ce statut a valu à Islamabad de bénéficier de milliards de dollars d'aide et d'accéder à certaines technologies militaires américaines avancées.

M. Mattis est attendu à son tour au Pakistan dans les prochaines semaines, selon des sources américaines et pakistanaises.