Le président américain Donald Trump a appelé Israéliens et Palestiniens à prendre des «décisions difficiles» pour la paix, avant de quitter Jérusalem sans avoir jamais précisé publiquement comment il s'y prendrait pour obtenir ce qu'il a appelé l'accord «ultime».

Il est arrivé mardi soir à Rome pour y rencontrer mercredi le pape François, avant de poursuivre son voyage vers Bruxelles pour le sommet de l'OTAN et la Sicile pour celui du G7.

De ses rencontres lundi avec le premier ministre israélien, Benyamin Néthanyahou, à Jérusalem et mardi avec le président palestinien, Mahmoud Abbas, à Bethléem en Cisjordanie occupée, M. Trump, lui-même «personnellement décidé à (les) aider à parvenir à un accord», a retenu que les deux antagonistes voulaient la paix.

«Cependant, faire la paix ne sera pas facile. Nous le savons tous», a déclaré celui qui, il y a seulement quelques semaines, déclarait que cela ne serait «peut-être pas aussi difficile».

«Les deux parties feront face à des décisions difficiles. Mais avec de la détermination, des compromis et la conviction que la paix est possible, Israéliens et Palestiniens peuvent conclure un accord», a-t-il déclaré devant un parterre d'officiels israéliens et américains au musée d'Israël à Jérusalem.

L'appel à des «décisions difficiles», reminiscent de ceux lancés par ses prédécesseurs qui se sont cassé les dents sur le conflit, représente le seul moment où M. Trump ait exprimé ouvertement une relative attente vis-à-vis des deux parties.

Sinon, M. Trump s'est gardé d'évoquer la solution dite à deux États, impliquant la création d'un État palestinien indépendant.

Cette solution reste la référence d'une grande partie de la communauté internationale. Mais M. Trump lui-même avait alarmé les Palestiniens en février en prenant ses distances avec elle. 

«Tout mon possible» 

Le président américain n'a pas davantage touché publiquement à des questions concrètes comme la colonisation, les frontières ou le statut de Jérusalem. Il n'est pas revenu sur sa promesse de déménager l'ambassade américaine en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem, un repoussoir pour Palestiniens et Arabes.

Lors de leur rencontre à Bethléem, M. Abbas lui a de nouveau exposé de vive voix le rêve palestinien d'un État indépendant, «le long des frontières de 1967, un État palestinien ayant pour capitale Jérusalem-Est vivant aux côtés de l'État d'Israël dans la sécurité et la paix».

Le court déplacement de M. Trump à Bethléem a été largement occulté par l'attentat suicide qui a tué 22 personnes à un concert pop lundi soir à Manchester (Angleterre). M. Trump a commencé sa déclaration au côté de M. Abbas en condamnant un acte de «losers malfaisants».

«Je ne les appellerai pas des monstres car ils aimeraient trop ce mot», a déclaré M. Trump, sombre et ferme. «A partir de maintenant, je les appellerai des losers parce que c'est ce qu'ils sont».

M. Trump n'a évoqué le conflit israélo-palestinien qu'en termes généraux, déclarant vouloir faire «tout (son) possible» pour aider Israéliens et Palestiniens à faire la paix qui les fuit depuis presque 70 ans.

«Pas avec Donald J. Trump»

M. Trump a pu embrasser du regard l'une des réalités israélo-palestiniennes les plus frappantes quand il a rallié Bethléem par la route en provenance de la proche Jérusalem.

Il a franchi en convoi le mur érigé par Israël pour se «protéger» des attaques palestiniennes, et le non moins impressionnant checkpoint qui commande cet accès de Bethléem.

L'horizon israélo-palestinien a rarement paru plus sombre. Les dernières négociations, sous les auspices des États-Unis, ont avorté en 2014, tandis que 2017 marque 50 années d'occupation et de colonisation israéliennes des Territoires palestiniens.

Pendant deux jours, M. Trump a exposé sa vision du règlement du conflit: elle irait de pair avec une convergence d'intérêts entre les pays arabes et Israël face à la menace de l'extrémisme et de l'Iran.

Mais il a aussi multiplié les déclarations et les actes d'amitié envers Israël et le peuple juif. Après avoir été le premier président en exercice à se rendre au Mur des Lamentations, haut lieu du judaïsme, il a déposé une gerbe au mémorial de la Shoah.

Il a promis de défendre Israël contre ses ennemis, le Hamas palestinien, le Hezbollah libanais, l'Iran. «Les dirigeants iraniens appellent régulièrement à la destruction d'Israël. Pas avec Donald J. Trump!» a-t-il martelé.

L'audience, debout, a salué ses propos par des applaudissements enthousiastes. «Je vous aime aussi», a-t-il lancé une fois le calme revenu.

Un script respecté... hormis quelques écarts

(Jonah Mandel, Jérusalem) - Minutieusement chorégraphiée, la visite de l'imprévisible président Donald Trump en Israël et en territoire palestinien occupé a quand même donné lieu en 28 heures à quelques écarts, américains ou israéliens.

Les mains vides

À la descente d'avion à l'aéroport de Tel-Aviv lundi, le président tend la main à son épouse avançant à son côté sur le tapis rouge. Elle semble la repousser d'une petite tape, selon des images vidéo largement partagées sur les réseaux sociaux.

«Reconnaître Jérusalem»

Les membres du gouvernement israélien ont l'occasion de serrer la main de M. Trump et d'échanger de brèves politesses avec lui à l'aéroport. Le ministre de l'Éducation Naftali Bennett saisit cette opportunité pour lui dire que le pays célèbre le cinquantième anniversaire de la prise de Jérusalem-Est et que le moment est venu de reconnaître tout Jérusalem comme la capitale d'Israël. «Bien joué», semble répondre M. Trump selon l'enregistrement de l'échange.

Égoportrait présidentiel

À l'aéroport encore, le député israélien Oren Hazan réussit à s'incruster au premier rang et à soutirer un égoportrait à M. Trump, malgré les tentatives d'obstruction du premier ministre israélien Benyamin Néthanyahou. La photo anime les réseaux sociaux. Le parlementaire raconte ensuite aux médias avoir dit au président qu'on l'appelait souvent le «Trump israélien». Cela «a été un moment historique pour moi, et pour lui aussi je crois».

Maudits médias

À la fin de la cérémonie, M. Trump et son épouse Melania devisent avec M. Néthanyahou et sa femme Sara sur leur affection et leur admiration réciproques, et leur aversion des médias. «À la différence des médias, la majorité des gens en Israël nous aiment, alors nous leur disons combien vous êtes courageux et ils vous aiment aussi», dit Mme Néthanyahou. «Nous avons là quelque chose en commun», répond M. Trump. «Nous avons beaucoup de choses en commun, Donald et moi», dit Mme Netanyahu à Mme Trump, «les médias sont les mêmes».

Du Proche-Orient au... Proche-Orient

S'exprimant à la résidence présidentielle israélienne lundi à Jérusalem, M. Trump rapporte que sa délégation et lui arrivent «tout juste du Proche-Orient» (où se trouve aussi Israël). Il se corrige rapidement pour dire qu'ils arrivent d'Arabie saoudite.

Intrusion russe

La visite soigneusement encadrée dévie brièvement des plans prévus lors d'une apparition de MM. Trump et Néthanyahou devant les médias. Un journaliste les interpelle sur le scandale des informations classifiées que le président américain aurait partagées avec des responsables russes reçus à la Maison-Blanche et qui proviendraient du renseignement israélien. «Je n'ai jamais mentionné le mot ou le nom d'Israël. Jamais mentionné ça au cours de cette conversation», répond M. Trump à la volée, «tout le monde dit que je l'ai fait, vous voilà donc avec une fausse histoire en plus».

Jérusalem, quel pays ?

Un direct vidéo de la Maison-Blanche, lundi, présente des déclarations de M. Trump comme faites à Jérusalem, Israël. La position traditionnelle des États-Unis sur Jérusalem veut que le statut de la ville soit négocié entre Israéliens et Palestiniens avant de trancher la question de souveraineté.

Le lendemain, l'orthodoxie diplomatique américaine est restaurée et Jérusalem redevient une ville sans état dans un nouveau direct de la Maison-Blanche.

REUTERS

Donald Trump et son épouse Melania.