Le président Hamid Karzaï et le secrétaire d'État John Kerry se sont séparés samedi sans finaliser d'accord sur une présence militaire américaine en Afghanistan après 2014, malgré d'intenses négociations à Kaboul qui ont achoppé sur la question de l'immunité des soldats américains.

«Nous sommes parvenus à une série d'accords», notamment concernant les modalités d'intervention d'un contingent américain, a déclaré le président afghan lors d'une conférence de presse conjointe avec M. Kerry au palais présidentiel de Kaboul.

En revanche, M. Karzaï a indiqué que la question de l'immunité juridique des soldats américains, réclamée avec insistance par Washington, n'était pas réglée. «Il n'y pas eu de consensus sur cette question», a-t-il dit.

«Il faut souligner que si cette question de (l'immunité) n'est pas résolue, malheureusement il ne pourra y avoir de traité», a averti de son côté le ministre américain.

Anticipant d'éventuelles difficultés, un responsable du département d'État avait laissé entendre un peu plus tôt que M. Kerry ne repartirait pas à coup sûr avec un accord en bonne et due forme, mais qu'il souhaitait «quitter Kaboul avec le plus de questions possibles réglées».

Les États-Unis négocient depuis près d'un an avec Kaboul cet accord bilatéral de sécurité (BSA), qui doit définir les modalités de la présence américaine en Afghanistan au terme de la mission de combat de l'OTAN, fin 2014, mais aussi le nombre des bases américaines dans ce pays et le statut des soldats américains sur place.

Cette dernière question est cruciale pour Washington, qui souhaite que les soldats qui se rendraient coupables de crimes en Afghanistan soient jugés par des juridictions américaines.

En Irak, les États-Unis comptaient maintenir un contingent au-delà de 2011, mais ils avaient finalement rapatrié l'ensemble de leurs troupes, car Bagdad avait refusé d'accorder l'immunité juridique aux forces américaines.

Hamid Karzaï a indiqué que la question de l'immunité serait soumise à la Loya Jirga, la grande assemblée de chefs de tribus et de représentants de la société afghane, soulignant que le règlement de ce problème «dépassait l'autorité du gouvernement» afghan.

Arrivé vendredi après-midi en Afghanistan pour une visite surprise de deux jours, M. Kerry s'est lancé dans des discussions interminables au palais présidentiel de Kaboul et qui ont largement dépassé le programme prévu, l'obligeant à retarder de plusieurs heures son départ vers Paris.

Si les tractations entre les deux hommes n'ont pas pu régler la question sensible de l'immunité, elles ont néanmoins permis aux deux parties de trouver un terrain d'entente sur de nombreux autres points «essentiels», selon M. Kerry.

L'administration afghane avait ainsi fait savoir qu'elle ne souhaitait pas signer un accord qui donnerait carte blanche aux Américains pour mener des opérations à leur guise sur le territoire afghan, et M. Karzaï semble avoir obtenu satisfaction sur ce sujet.

«Il n'y aura pas d'opérations ou d'actions arbitraires de la part des Américains, et un document écrit a été rédigé pour donner des garanties quant à la protection des vies et des biens des Afghans», a déclaré le président afghan.

Les États-Unis souhaitent boucler un accord rapidement, d'ici à une date-butoir qui avait été fixée à la fin octobre par le président américain Barack Obama et son homologue afghan.

«Plus cela prendra du temps, plus cela sera dur à planifier», a souligné un diplomate américain au sujet d'un éventuel contingent américain après 2014.

Trouver un accord est d'autant plus pressant que la majorité des quelque 87 000 soldats de l'OTAN doivent quitter l'Afghanistan d'ici à la fin 2014.

Ce retrait fait craindre une nouvelle flambée de violences dans un pays en proie à une violente insurrection des talibans, chassés du pouvoir en 2001 par une coalition militaire internationale menée par les États-Unis.

Le départ des troupes de l'OTAN s'effectuera de surcroît dans un contexte politique sensible, une élection présidentielle étant prévue le 5 avril prochain. À ce sujet, M. Kerry a indiqué que les États-Unis soutiendraient des «élections libres et équitables».