Depuis maintenant neuf ans, une école près de Bethléem tente de ramener la langue de Jésus à l'usage courant en Terre sainte. Mais la communauté se heurte à des difficultés: l'araméen, peu utilisé à l'extérieur des prières, n'est compris que par une minorité de gens.

«La langue était très commune avant et certaines personnes âgées la parlent encore, note le père Boutrous, responsable de l'enseignement de l'araméen à l'école Mor Aphrem de Beit Jala. Nous enseignons aussi la langue écrite, mais ce n'est pas facile, parce que personne ne peut aider les enfants à la maison.»

L'école privée compte environ 300 élèves, filles et garçons, de la maternelle à la 6e année. Une nouvelle classe est ajoutée chaque année pour permettre aux élèves de poursuivre le même programme jusqu'à la fin des études secondaires. Les leçons d'araméen, langue sémitique comme l'hébreu et l'arabe, sont données deux fois par semaine.

«C'est important d'enseigner l'araméen pour l'existence de la chrétienté en Terre sainte, explique la directrice de Mor Aphrem, Amal Bahnam. Jésus-Christ est né ici. Il parlait cette langue. Ça fait partie de notre héritage.»

Les responsables de l'école, affiliée à l'Église syriaque orthodoxe, veulent encourager les enfants à comprendre les prières prononcées en araméen. Mais l'établissement scolaire est ouvert à tous et compte des musulmans et des chrétiens de diverses dénominations parmi ses pupilles.

La langue est aussi enseignée à Jish, dans le nord d'Israël. L'école de Jish a rencontré une certaine opposition à la fois de musulmans craignant une conversion déguisée et de chrétiens soucieux de préserver une unité basée sur l'ethnicité arabe plutôt que l'appartenance religieuse. Mais la directrice de Mor Aphrem affirme que le programme a été établi sans résistance.

«Nous n'avons pas eu de problèmes avec les musulmans, je ne crois pas qu'ils se sentent exclus, note-t-elle. Ici, il y a des écoles françaises, des écoles allemandes: les gens peuvent choisir.»

L'école utilise des livres publiés en Suède, où des communautés originaires du Moyen-Orient tentent aussi de transmettre la langue à la jeune génération grâce à des publications et à une station de télévision. L'araméen est encore utilisé dans plusieurs villages chrétiens de Syrie et d'Irak. Entre 30 000 et 80 000 personnes le parleraient encore, pour l'essentiel en Syrie.

Mais tout le monde ne voit pas l'intérêt de faire revivre cette langue en voie de disparition. «C'est une très vieille langue, souligne William, vendeur de Beit Jala de confession grecque-orthodoxe. Même l'arabe, qui est une langue forte, a de la difficulté à garder le rythme avec tous les nouveaux mots pour les technologies, qu'il emprunte à l'anglais. Nous perdons déjà notre langue.»

80 000

Entre 30 000 et 80 000 personnes parleraient encore l'araméen, pour l'essentiel en Syrie.

-Avec l'AFP