Cinq ans après la fin de la guerre entre Israël et le mouvement politique chiite Hezbollah, le sud du Liban est truffé de sous-munitions. En 2006, pendant les 72 dernières heures du conflit, l'État hébreu en a largué plus de quatre millions. Aujourd'hui, sept démineuses nettoient cette région où un faux pas peut causer la mort.

Lamis Zein enseignait l'anglais aux enfants il y a trois ans. La femme voilée supervise maintenant l'équipe de Libanaises qui risquent leur vie tous les jours pour nettoyer le sud du Liban. Un pas de travers et elles peuvent sauter sur une des nombreuses sous-munitions israéliennes.

Lamis est la seule femme du pays entraînée à démolir les engins trouvés sur le terrain. Sur son équipement protecteur, son groupe sanguin est en évidence. Les recherches donnent lieu à une concurrence amicale. «Quand une femme en trouve une, les autres espèrent être la prochaine!», dit-elle.

Le matin de notre visite, Soukainah Ismail venait de trouver le 74e projectile de la zone qu'elle nettoie depuis le mois de mai. Sa superviseure a fait sauter l'engin à l'aide d'un autre explosif.

Lorsque les femmes mangent un sandwich pendant la pause, un bruit sourd se fait entendre dans la vallée. Un sourire de fierté s'affiche alors sur le visage de Soukainah. Une bombe de moins.

L'équipe 100% féminine, embauchée par l'ONG Norwegian People's Aid (NPA), travaille depuis plus de deux ans avec l'armée libanaise. «Au Liban, on ne fait pas d'équipes mixtes parce que l'on considère que les femmes se comprennent mieux entre elles, dit le directeur de l'exploitation de NPA, Kassem Ghossein. Elles n'entrent pas en concurrence avec des hommes qui voudraient leur montrer qu'ils sont les plus forts. Elles sont patientes et elles font vraiment bien leur boulot.»

Horizon 2016

Ces Libanaises étaient enseignantes ou ménagères lorsqu'Israël est entré en guerre contre le Hezbollah, en juillet 2006. Des centaines de milliers d'engins meurtriers sont toujours sur le terrain. Le déminage complet de la région ne se terminera pas avant 2016.

Lorsqu'elle est lancée, une bombe à sous-munitions éclate dans le ciel et libère des dizaines de petits projectiles qui se répandent au hasard. Environ 40% de ces engins n'ont pas explosé lorsqu'ils ont touché le sol, ce qui en fait de véritables mines antipersonnel.

Coiffées d'un lourd casque à visière et parfois d'un voile, protégées par une veste en kevlar, les démineuses cherchent les sous-munitions, éparpillées un peu partout dans le village d'Ayta al-Jabal, à une quinzaine de kilomètres d'Israël. Elles ratissent la terre rouge, armées de détecteurs électromagnétiques.

Abeer Hasan est assise dans un bâtiment en ruine pour déjeuner. Elle enfile les cigarettes. Il y a deux ans, sa famille n'était absolument pas d'accord avec son nouvel emploi. «Après un mois de formation, quand je leur ai appris les règles de sécurité, ils ont accepté, dit la Palestinienne de la région de Tyr, entre deux bouffées. C'est un travail dangereux, mais, si on suit la procédure, on réduit grandement les risques.»

«Lorsque je trouve les sous-munitions, je sens que je sauve des vies», ajoute Nada Naameh, 26 ans, qui porte le voile sous son casque. De plus, j'ai un très bon salaire pour faire ce travail.»

Condamnées par l'ONU

L'ONU a condamné le recours par Israël à des bombes à sous-munitions, «utilisées délibérément pour rendre inaccessibles à la population civile des régions agricoles». Depuis la fin de la guerre, ces engins ont tué environ 270 personnes au Liban, selon NPA.

Les enfants sont particulièrement vulnérables puisqu'ils confondent ces projectiles avec des jouets. «À la fin de la guerre, il y avait des sous-munitions partout. Sur les toits, sur les routes et même dans les maisons!», dit Kassem Ghossein.

Lorsque les démineuses quittent une zone nettoyée, les agriculteurs récoltent de nouveau les olives, le blé ou le tabac. «Malheureusement, plusieurs continuent de travailler la terre même s'ils savent qu'elle est contaminée, constate M. Ghossein. Ils prennent ce risque parce que c'est leur seule source de revenus.»