Les ministres européens des Affaires étrangères ont plaidé samedi lors d'une réunion à Sopot pour essayer de limiter les dégâts que pourrait causer une demande de reconnaissance d'un État palestinien lors de la prochaine assemblée générale de l'ONU.

L'objectif de l'UE est d'«éviter ce qui pourrait être un échec pour tout le monde à l'Assemblée générale», a estimé le Français Alain Juppé à l'issue des débats.

Face à l'impasse dans laquelle se trouvent les pourparlers avec Israël, les Palestiniens réclament un État dans les lignes du 4 juin 1967, antérieures à la Guerre des Six Jours, c'est-à-dire incluant la Cisjordanie, la bande de Gaza et Jérusalem-Est, dont ils veulent faire leur capitale.

Mais selon M. Juppé, l'adoption par une large majorité de l'Assemblée d'une résolution reconnaissant immédiatement l'État palestinien serait un échec pour Israël qui «se retrouverait forcément isolé».

Ce serait aussi un «échec pour les Palestiniens», a-t-il ajouté en référence aux «menaces d'interruption de financement» qui pèsent sur eux. Israël notamment a brandi la menace de mesures de rétorsion.

Ce serait enfin un «échec pour l'Amérique qui se trouvera isolée et (un) échec pour les Européens qui risqueraient de se diviser», a jugé le ministre français. Washington a menacé d'opposer son veto à la démarche palestinienne devant le Conseil de sécurité et les Européens ont des positions divergentes sur la question.

Selon un diplomate européen, le ministre tchèque Karel Schwarzenberg a prévenu ses collègues à Sopot que son pays ne voterait «aucune résolution à l'ONU quelle qu'elle soit». Les Pays-Bas, mais aussi l'Allemagne, sont opposés à des manoeuvres «unilatérales», tandis que l'Espagne notamment a dit soutenir la démarche palestinienne.

La demande, qui pourrait être déposée le 20 septembre à l'ONU, n'est pas encore formulée et le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a promis samedi d'en révéler d'ici quelques jours des détails.

D'ici là, l'UE, premier partenaire économique d'Israël et premier fournisseur d'aide aux Palestiniens, a «un rôle particulier à jouer», au lieu de «se contenter de jouer les guichets de banque», plaide Alain Juppé.

«Notre idée, c'est de travailler à trouver les bases d'une résolution qui serait acceptable pour les différentes parties», a-t-il estimé à l'issue des débats de Sopot.

«Il s'agit maintenant de sonder de manière intelligente et d'essayer naturellement d'influencer les différentes parties du processus de paix au Proche-Orient de manière constructive», a renchéri son homologue allemand Guido Westerwelle.

Le ministre autrichien Michael Spindelegger a été jusqu'à proposer que l'UE puisse déposer sa propre résolution à l'Assemblée générale de l'ONU, précisant que ce n'était qu'une «option».

«Il y a la possibilité d'exercer des pressions, d'être plus actifs en tant qu'Europe au Proche-Orient, d'être vus comme un partenaire qui peut aussi avoir des résultats», a jugé M. Spindelegger.

Au final, il faudra voir «ce que les Palestiniens demanderont en réalité», a-t-il estimé. Au lieu de réclamer une reconnaissance par le Conseil de sécurité, ils pourraient ainsi se contenter de demander un autre statut. «Il va falloir au préalable le clarifier avec eux», a jugé M. Spindelegger.

Parmi les options figure la «solution suisse», ont reconnu plusieurs ministres. La Confédération helvétique, avant de devenir membre à part entière, a d'abord été un État doté du statut d'observateur.

Cette formule --si les Palestiniens obtenaient l'approbation des deux tiers des États membres de l'Assemblée générale des Nations unies-- leur permettrait en effet de devenir membres à part entière de toutes les agences de l'ONU, comme l'OMS (Organisation mondiale de la santé), l'UNESCO, ou l'Unicef.