Une «initiative diplomatique» de paix que fait miroiter le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu suscite, avant même son lancement, un large scepticisme en Israël.

Le chef du parti Likoud (droite) sera-t-il prêt à faire les compromis nécessaires en direction des Palestiniens pour rendre crédible pareille initiative? Rares sont ceux à y croire parmi les analystes et dans la classe politique.

«Pour qu'il y ait la moindre chance de convaincre de sa volonté de paix, non seulement les Palestiniens mais la communauté internationale, Netanyahu devra prendre nettement position pour un retrait israélien de la Cisjordanie, avec des rectifications de frontières», affirme le politologue Menachem Klein.

«Si c'est le cas, les Palestiniens feraient bien de ne pas fermer la porte à la négociation, mais je doute que Netanyahu aille aussi loin tant il est prisonnier de ses conceptions idéologiques et otage de ses alliés politiques» ultra-nationalistes, souligne ce professeur de l'université Bar Ilan, près de Tel-Aviv.

Selon lui, l'initiative diplomatique attendue de Netanyahu est à ce stade un «ballon d'essai».

Pour le chercheur Yossi Alpher, il s'agit ni plus ni moins d'un «exercice de relations publiques, destiné en premier lieu à Washington».

M. Alpher exclut toute reprise de la négociation sans un gel effectif de la colonisation et juge improbable que «Netanyahu paie un tel prix qui lui coûterait sa coalition gouvernementale».

Pourtant, l'aile modérée du gouvernement le presse de présenter des propositions nouvelles, ne serait-ce que pour ne pas laisser le champ libre aux Palestiniens qui marquent des points sur la scène internationale.

M. Netanyahu a exprimé lui-même sa préoccupation de l'isolement d'Israël et des dangers de la poursuite du statu quo en Cisjordanie qui risque de transformer Israël en «État binational», lui faisant perdre son caractère juif.

Il envisage de dévoiler ses propositions au Congrès à l'occasion d'une visite qu'il doit effectuer à Washington le 22 mai prochain à l'invitation du lobby pro-israélien AIPAC, selon des fuites de son entourage.

Elles porteraient sur un «accord intérimaire» à long terme avec les Palestiniens au lieu de négociations sur un règlement final, sans gel de la colonisation, des idées que les Palestiniens ont d'ores et déjà rejetées.

L'ex-ministre travailliste Yossi Beilin doute dans ce contexte du sérieux de l'initiative. «Netanyahu donne l'impression de miser sur un refus des Palestiniens afin de rejeter sur eux la responsabilité du blocage», estime cet ancien architecte des accords d'Oslo de 1993.

Selon lui, «les Palestiniens ont de bonnes raisons de craindre qu'un accord intérimaire, menant à la constitution d'un mini-Etat, sur 50% de la Cisjordanie, serve à pérenniser l'occupation du reste du territoire».

La dirigeante de l'opposition Tzipi Livni, à la tête du parti centriste Kadima, n'est pas moins sceptique. «Bien entendu, nous soutiendrons toute démarche dans la bonne voie, mais nous n'en voyons aucune», a-t-elle commenté mardi.

A droite, des ministres du Likoud ont mis en garde contre toute concession, le suppléant du Premier ministre Sylvan Shalom affirmant qu'«il fallait surtout éviter tout acte unilatéral sous la pression».

L'isolement d'Israël s'est manifesté lors du débat au Conseil de sécurité sur le projet de résolution arabe jugeant «illégale» la colonisation dans les Territoires palestiniens occupés et demandant son arrêt.

Quatorze des 15 membres du Conseil, dont les Européens, ont voté en faveur de la résolution, alors que les Etats-Unis imposaient de mauvais gré un veto, au risque d'en faire «payer un jour la facture» à Israël, selon des sources diplomatiques israéliennes.