L'Irak et le Koweït ont décidé mercredi d'accélérer la résolution des problèmes qui empoisonnent leurs relations depuis plus de vingt ans, à l'occasion d'une visite historique à Bagdad du premier ministre koweïtien Nasser Mohammad al-Ahmad al-Sabah.

Il s'agit de la première visite d'un chef de gouvernement koweïtien en Irak depuis la Guerre du Golfe (1990-1991). Le dernier à s'y rendre fut cheikh Saad al-Abdallah al-Sabah, en 1989, un an avant que les forces de l'ex-président irakien Saddam Hussein n'envahissent le Koweït.

Cheikh Nasser a été accueilli en grande pompe à l'aéroport de Bagdad par son homologue irakien Nouri al-Maliki.

Après une revue des troupes, les deux hommes ont tenu un entretien au bureau de M. Maliki dans le centre de la capitale, évoquant les différents sujets de contentieux entre les deux pays.

Bagdad doit encore reconnaître officiellement les frontières terrestres et maritimes du Koweït, restituer des biens et des archives volées durant l'invasion, et régler le problème des disparus. Il doit aussi verser 21 milliards de dollars sur les 65 fixés pour les compensations au Koweït.

L'Irak conteste notamment les frontières telles que tracées en 1993 par le Conseil de sécurité. S'il est prêt à reconnaître la frontière terrestre du Koweït, il estime que sa frontière maritime lui bloque l'accès au Golfe, vital pour son économie.

Les Premiers ministres irakien et Koweïtiens «ont décidé de former une commission dirigée par les ministres des Affaires étrangères qui s'efforcera de régler au plus vite ces questions», a déclaré à l'AFP Ali Moussawi, un conseiller de M. Maliki.

«Cette discussion a eu lieu dans un climat positif», a-t-il poursuivi. «Les deux parties ont montré leur volonté de développer leurs relations et de dépasser les problèmes liés à la frontière, à l'économie et à la sécurité.»

Le chef de la diplomatie koweïtienne, cheikh Mohammed Sabah al-Salem al-Sabah, a confirmé la formation de cette commission lors d'une conférence de presse télévisée avec son homologue Hoshyar Zebari.

«Nous voulons jeter des ponts entre nos deux peuples», a-t-il dit, citant de possibles investissements koweïtiens dans les infrastructures irakiennes.

Il a par ailleurs confirmé que l'émir du Koweït assisterait en personne au sommet arabe que l'Irak doit organiser au printemps.

«Cette visite constitue un message politique très important au moment où l'Irak prépare l'organisation du prochain sommet arabe», a estimé le vice-ministre irakien des Affaires étrangères, Labid Abawi.

Si le Conseil de sécurité de l'ONU a levé en décembre une série de sanctions imposées à l'Irak de Saddam Hussein après l'invasion du Koweït, Bagdad, même débarrassé de son ancien président, est encore loin d'en avoir terminé avec les conséquences de cette guerre.

L'Irak doit régler avec son voisin les points de contentieux pour sortir définitivement du Chapitre VII de la charte de l'ONU, qui autorise le recours aux sanctions ou à la force, et recouvrer sa pleine souveraineté.

Lundi, un garde-côte koweïtien a été tué dans une fusillade avec un bateau de pêche irakien, illustrant la gravité du contentieux frontalier.

Les archives et les biens volés s'étaient évanouis dans le chaos qui a suivi l'invasion de l'Irak par les États-Unis en 2003, et malgré les appels par voie de presse, personne n'est venu rendre les objets dérobés. La recherche de 300 personnes disparues est en cours sous les auspices de la Croix-Rouge internationale.