Le président afghan Hamid Karzaï a condamné samedi l'opération antidrogue menée par les Russes et les Américains «sans sa permission» dans l'est de l'Afghanistan et a demandé des «explications» au commandement de l'Otan.

«Aucune organisation ou institution n'a le droit de mener ce type d'opérations sur notre territoire sans la permission et l'accord du gouvernement afghan», indique la présidence afghane dans un communiqué.

«L'Afghanistan condamne cette action de l'Otan et rappelle que ces opérations unilatérales sont une violation claire de la souveraineté de l'Afghanistan et des lois internationales», a ajouté la présidence, prévenant qu'il y aurait une «réaction» de Kaboul si ce type d'opérations se répétait.

Le représentant à Kaboul du service russe antidrogue, Alexeï Milovanov, a déclaré à l'AFP que le président Karzaï avait été «mal informé».

«Il s'agissait d'une opération menée par le ministère afghan de l'Intérieur, pas par nous», a déclaré M. Milovanov.

«Nous avons simplement agi en qualité de conseillers, conformément à l'accord entre les gouvernements afghan et russe sur la présence de conseillers pendant une opération antidrogue», a affirmé M. Milovanov.

Russes et Américains ont mené pour la première fois une opération antidrogue commune en Afghanistan, avait annoncé vendredi le chef du service russe antidrogue, Viktor Ivanov, en précisant que Moscou souhaitait multiplier ce type d'actions et déployer ses spécialistes sur place.

L'intervention a permis la destruction de 932 kg d'héroïne et 156 kg d'opium pour une valeur de 250 millions de dollars, selon M. Ivanov, cité par les agences russes.

Il avait précisé que quatre agents du service russe antidrogue, des forces spéciales américaines et des agents du ministère afghan de l'Intérieur avaient participé à l'opération, qui a nécessité trois mois de préparation.

«C'était un noeud de trafic de drogue très important situé à cinq kilomètres de la frontière afghano-pakistanaise», avait souligné M. Ivanov.

M. Ivanov avait par ailleurs assuré que la Russie était prête à former les services antidrogue de Kaboul. «Mais cette question n'est pas réglée, il faut l'aval des autorités afghanes», avait-il dit.

Moscou dénonce régulièrement la croissance du trafic de drogue depuis l'Afghanistan et l'attribue notamment au laxisme des forces américaines dans ce pays. La Russie est opposée à l'idée d'envoyer ses soldats sur le terrain afghan, toujours hantée par son humiliant retrait militaire d'Afghanistan en 1989, après une décennie d'un bourbier qui mit en évidence les faiblesses de l'armée rouge et porta atteinte à l'image de l'URSS.

L'Afghanistan produit environ 90% de la production mondiale d'opium.

Le pays a généré 3600 tonnes d'opium cette année soit une baisse de près de 50% par rapport à la production de 2009, selon une estimation fin septembre de l'Organisation des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC).

Mais en valeur, cette production est en hausse de 38%, représentant quelque 604 millions de dollars, selon l'Afghanistan Opium Survey 2010.