Au moins 37 personnes ont été tuées jeudi soir et 175 blessées dans un double attentat suicide visant le mausolée d'un saint de l'islam rempli de pèlerins à Lahore, dans l'est du Pakistan, pays en proie à une vague sanglante d'attaques des talibans alliés à Al-Qaïda.

La police et la mairie avaient initialement évoqué trois explosions.

Un premier kamikaze a déclenché sa veste bourrée d'explosifs dans la cour de ce gigantesque complexe en plein centre ville, puis un second a actionné sa bombe dans le sous-sol, où de nombreux pèlerins s'asoient pour méditer le jeudi soir lors d'un rassemblement hebdomadaire de milliers de personnes, a raconté à l'AFP Chaudhry Shafiq, un officier de la police de Lahore.

«Au moins 37 personnes ont été tuées et 175 blessées dans deux attentats suicide» dans ce complexe, au coeur de la vieille ville historique, qui abrite le tombeau d'un saint soufi, a indiqué à l'AFP Aslam Tareen, le chef de la police de Lahore, mégalopole de quelque 10 millions d'habitants et deuxième ville du pays.

Le mausolée de Data Darbar recèle le tombeau du saint Hazrat Syed Ali bin Usman Hajweri, connu sous le nom de Data Ganj Bakhsh. Né à Ghazni, dans le centre de l'Afghanistan, il avait parcouru l'Asie du Sud au XIe siècle pour prêcher l'islam et convertir de nombreuses personnes. Il est mort à Lahore en 1077.

«C'était des attentats suicide, nous avons retrouvé les têtes et des membres de deux kamikazes», a expliqué Khusro Pervez, le chef de l'administration de la mairie. «Nous tentons de savoir comment ils ont pu pénétrer ainsi sur les lieux en dépit d'un important dispositif de sécurité», a-t-il ajouté.

Des policiers sur place ont ramassé d'innombrables petites billes d'acier et de clous dont les kamikazes bourrent d'ordinaire leurs vestes suicide.

Les attaques de Lahore n'ont pas été revendiquées mais les talibans pakistanais alliés à Al-Qaïda, ainsi que des groupes qui leur sont liés, sont responsables d'une vague sans précédent d'attentats - suicide pour la plupart - qui ont fait plus de 3 400 morts dans tout le pays en trois ans.

Ces derniers mois, leur cible principale est Lahore.

Il y a un mois, le 28 mai, plus de 80 personnes y avaient péri dans les attaques simultanées par des kamikazes lourdement armés de deux mosquées d'une secte très minoritaire de l'islam, les ahmadis.

Et le 12 mars, un double attentat suicide visant des militaires, à Lahore également, avait fait 57 morts.

Deux kamikazes s'étaient approchés de véhicules de l'armée et avaient fait exploser leurs bombes à proximité d'un marché très fréquenté.

Quatre jours auparavant, à Lahore toujours, un kamikaze au volant d'une voiture piégée avait pulvérisé un immeuble de la police, tuant 15 policiers et passants.

Plusieurs des précédentes attaques de Lahore avaient été revendiquées par le Mouvement des talibans du Pakistan (TTP), principal groupe d'insurgés islamistes, qui a fait allégeance à Al-Qaïda dès sa création en décembre 2007, et dont les fiefs sont les zones tribales du nord-ouest, frontalières avec l'Afghanistan.

Le TTP est le principal responsable des attentats depuis l'été 2007 quand, à l'unisson d'Oussama ben Laden en personne, il avait décrété le jihad contre Islamabad, allié-clé de Washington dans sa «guerre contre le terrorisme».

Faisal Shahzad, l'Américain d'origine pakistanaise accusé d'être l'auteur de l'attentat raté du 1er mai à Time Square à New York, a avoué avoir passé 40 jours dans les zones tribales avec les talibans, dont cinq pour apprendre à fabriquer des bombes, et le TTP a revendiqué cette tentative d'attentat.

Les zones tribales du Pakistan sont considérées par Washington comme «la région la plus dangereuse du monde», fief des talibans pakistanais, principal sanctuaire d'Al-Qaïda dans le monde, et base arrière des talibans afghans qui combattent de l'autre côté de la frontière les quelque 142 000 soldats des forces internationales.