Les talibans ont nié dimanche toute implication dans l'enlèvement de deux journalistes français mercredi au nord-est de Kaboul, alors que l'armée française restait mobilisée pour les retrouver au cinquième jour de leur disparition.

«Nous ne sommes pas impliqués», a déclaré à l'AFP Zabihullah Mujahid, un porte-parole des talibans joint par téléphone et s'exprimant d'un lieu inconnu. «Nous avons demandé à nos combattants de nous informer s'ils avaient fait quelque chose mais nous n'avons aucune information venant de cette zone», a ajouté le porte-parole.

Les talibans communiquent régulièrement mais leurs messages doivent souvent être pris avec précaution. Loin d'être homogènes, ils sont une nébuleuse de groupes parfois autonomes et pas toujours en lien avec le commandement.

C'est cependant la première fois que les talibans, ou un autre groupe armé afghan, s'exprimaient sur l'enlèvement des deux journalistes français de la chaîne publique de télévision France 3.

Véronique Veber, consoeur des journalistes kidnappés et présente à Kaboul, avait elle affirmé à l'AFP que les ravisseurs étaient des «talibans».

Partis mercredi matin de Kaboul, avec trois accompagnateurs afghans, les deux journalistes, qui travaillent pour le magazine Pièces à conviction, auraient dû rentrer dans l'après-midi dans la capitale afghane.

Mais les cinq hommes «ont été enlevés sur la route entre Surobi et Tagab», dans la province de Kapisa, a indiqué Mme Veber à l'AFP.

Selon elle, ils ont été enlevés par «des talibans qui leur ont tendu un guet-apens» dans le village d'Omarkheyl, à une dizaine de km au sud de Tagab où se trouve la base militaire française la plus proche.

La région où s'est déroulé l'incident est instable et sous l'influence du Hezb-e-Islami, groupe armé rebelle du chef de guerre historique Gulbuddin Hekmatyar, recherché par les Américains mais toujours en fuite, et allié occasionnel des talibans contre les forces américaines et de l'OTAN.

Dans une interview au quotidien Le Parisien/Aujourd'hui publiée dimanche, le ministre français de la Défense Hervé Morin a affirmé que la France n'avait reçu «aucune revendication ni aucune demande de leurs probables ravisseurs».

«Moins on en parle, mieux c'est pour la sécurité (des deux journalistes et des trois Afghans, ndlr). Nous n'avons aucun contact direct nous permettant de vous donner des nouvelles d'eux», a ajouté M. Morin.

De son côté, l'armée française continuait ses recherches pour retrouver les kidnappés, contrôlant notamment les véhicules sur la route où les cinq hommes ont été enlevés, afin d'empêcher leur «exfiltration à bord d'un véhicule» vers une autre région, a indiqué un officier français sur la base de Tagab.

La plupart des étrangers enlevés en Afghanistan et qui sont restés détenus par leurs ravisseurs dans le pays ont été libérés après quelques semaines.

Mais la situation se complique lorsque les ravisseurs donnent ou revendent leur(s) otage(s) à des groupes rebelles qui les emmènent dans les zones tribales, instables, montagneuses et reculées, situées le long de la frontière afghano-pakistanaise, fiefs des talibans et de leurs alliés d'Al-Qaeda.

Ce fut le cas d'un journaliste américain du New York Times, David Rohde, kidnappé en novembre 2008 au sud de Kaboul avec un journaliste afghan et un chauffeur. Les deux journalistes avaient été emmenés chez des talibans dans le Waziristan du Nord, un fief tribal des rebelles au Pakistan, et n'en étaient sortis qu'en juin 2009, plus de six mois après leur enlèvement.