Supermarchés bondés, demande en hausse et banquets gargantuesques: si les budgets sont plombés par la crise, dans la plupart des pays du Moyen-Orient, les consommateurs ne modifient pas leurs habitudes pour le mois sacré du ramadan.

Dans la bande de Gaza toutefois, le ramadan est cette année tout sauf festif, neuf mois après l'offensive israélienne qui a fait plus de 1400 morts. Dans le Golfe, les supermarchés sont pris d'assaut par des clients achetant les mets qui garniront les tables de l'iftar, le repas de rupture du jeûne après le coucher du soleil.

En dépit de la crise financière mondiale, beaucoup considèrent que le ramadan ne peut être le mois des économies, quitte à se serrer la ceinture après le Fitr, la fête qui marque la fin du mois de jeûne.

«C'est le seul mois où les familles se rassemblent autour de grands banquets. La crise n'a pas d'importance», souligne à Dubaï Oumm Saïd, une ménagère émiratie. «Les gens oublient leurs soucis pendant ces réunions.»

«Pendant le ramadan, les gens s'invitent et se font inviter. C'est comme si c'était à ceux qui achètent le plus de nourriture et cuisinent le plus de plats», ajoute-t-elle.

La crise n'a aucune retombée sur le ramadan, affirme Mashael Mekki, une Soudanaise de Dubaï.

«Les gens achètent les mêmes quantités que l'an passé. C'est le ramadan: les gens ont faim», note-t-elle.

Pour Mohamed al-Sada, un fonctionnaire qatari de 32 ans, le ramadan est «particulier», et songer à faire des économies pendant cette période est «impensable».

«Chaque année, il y a des marchandises que je dois acheter», explique-t-il. «Peut-être que j'économiserai après le ramadan pour combler mon déficit. Mais nous n'allons pas changer nos habitudes.»

Beaucoup de consommateurs se plaignent toutefois d'une flambée des prix de certains aliments de base.

«Ils ont augmenté les prix de certains produits dont nous avons le plus besoin, comme le riz, les légumes, le pain et la viande», déplore Oumm Khalifa.

Cette tendance à la hausse est récurrente car liée à la hausse de la demande lors du ramadan. Chaque année, les autorités annoncent des mesures pour tenter d'enrayer l'inflation.

Au Qatar, les prix ont augmenté de 40 à 90% lors des premiers jours du ramadan.

Ailleurs au Moyen-Orient, en Syrie, en Égypte, en Jordanie ou au Liban, les consommateurs ne semblent pas non plus se priver cette année pour le ramadan. Partout, cafés et restaurants restent ouverts tard, pour permettre aux clients de se retrouver autour de thés ou de narguilés.

Mais, dans la bande de Gaza, le ramadan vient surtout rappeler cette année la misère dans laquelle les Palestiniens sont plongés du fait du blocus israélien, neuf mois après une offensive qui a dévasté la petite enclave.

Sur les marchés, beaucoup d'étals sont vides et les produits disponibles, souvent importés via les tunnels de contrebande entre l'Égypte et Gaza, atteignent des prix jamais vus.

Père de sept enfants, Sami, 40 ans, va consacrer le peu d'argent qu'il a réussi à amasser aux frais de la rentrée scolaire, pas au ramadan.

«La plupart des gens à Gaza sont sans travail et n'ont donc aucune source de revenus», dit-il. «Ils ne savent pas quand le prochain désastre va se produire ni comment ils pourront y faire face».

Signe de la morosité dans le territoire palestinien: les lanternes qui ornent les rues des villes du monde arabo-musulman pour le ramadan. À Gaza, elles ne décorent que les devantures de quelques échoppes.