Le pape Benoît XVI est arrivé hier à Jérusalem, dans le cadre de sa visite au Moyen-Orient. Il a immédiatement visité le musée Yad Vashem, consacré à l'Holocauste, où il a livré un discours très attendu.

«Puissent leurs souffrances n'être jamais niées, diminuées ou oubliées!» a déclaré le pape, en référence aux victimes juives des nazis.

 

Ce passage est la seule référence qu'il a faite à une controverse qui a frappé le Vatican l'hiver dernier, après la levée de l'excommunication de quatre évêques membres d'un groupe très conservateur. L'un des évêques lefebvristes, Richard Williamson, s'est révélé être un négationniste notoire, un détail qu'ignorait le Vatican.

Cette controverse rend le voyage de Benoît XVI très délicat, d'autant plus qu'il s'apprêterait à canoniser Pie XII, qui était pape durant la Deuxième Guerre mondiale et est souvent accusé de ne pas avoir dénoncé explicitement l'Holocauste durant la guerre.

Le vaticaniste de l'hebdomadaire américain The National Catholic Reporter, John Allen, a d'ailleurs noté que lors de la visite de Jean-Paul II à Jérusalem en 2000, ce dernier avait établi un lien entre l'Holocauste et l'antisémitisme chrétien, lien que Benoît XVI s'est abstenu de faire.

Dans un communiqué, la branche canadienne du B'nai Brith s'est déclarée «encouragée» par la visite du pape à Yad Vashem, mais a demandé des «actions concrètes pour clarifier des aspects troublants de déclarations récentes et proposées du Saint-Siège à propos de l'Holocauste».

Ce n'est pas la première fois qu'un voyage de Benoît XVI lié à l'Holocauste génère la déception. En 2006, à Auschwitz, il avait affirmé que les nazis ne voulaient pas seulement éradiquer le judaïsme, mais aussi le christianisme.

Cela dit, le voyage de Jean-Paul II à Jérusalem, dont le souvenir le plus vif a été la prière du pape devant le mur des Lamentations, avait aussi suscité la controverse. Avant une rencontre de Jean-Paul II avec le mufti de la mosquée Al-Aqsa, ce dernier avait affirmé que les juifs étaient haïs dans tous les pays, et donc qu'ils avaient causé leur propre malheur en Allemagne nazie.

Depuis son arrivée vendredi dernier en Jordanie, le pape a aussi croisé le fer avec les musulmans. Il a réclamé davantage de liberté religieuse dans les pays musulmans, où les chrétiens souffrent souvent de discrimination. Des centaines de milliers de chrétiens ont fui le Moyen-Orient, dépeuplant des communautés enracinées depuis près de 2000 ans. Bethléem, qui comptait 80% de chrétiens à l'indépendance d'Israël, n'en recense plus que 16%, selon une étude du magazine jésuite America.

Signe que les relations avec le monde musulman sont une priorité pour Benoît XVI, sa visite d'une mosquée à Amman lui vaut un record. Jean-Paul II, premier pape à visiter une mosquée, s'était limité à une seule visite, alors que Benoît XVI en est déjà à sa deuxième visite.

Le reste de la semaine mènera le souverain pontife à Tel-Aviv, à Bethléem et à Nazareth - il a aussi visité le lieu où Jésus a été baptisé, Béthanie, en Jordanie. La fin de son séjour sera scrutée à la loupe, à cause de l'ambiguïté dont avait fait preuve le Vatican face à la guerre à Gaza, en janvier.

Hier, en descendant de l'avion, il a réitéré sa croyance que la paix passe par un pays palestinien. Mais immédiatement après, il a rendu visite à la famille de Gilad Shalit, soldat israélien détenu par le Hamas depuis 2006.

 

LES CHRÉTIENS AU MOYEN-ORIENT

LIBAN

1,35 million à 1,6 million 34% à 41% de la population

ISRAËL

144 000 à 196 000

2,1% à 2,8% de la population

GAZA ET CISJORDANIE

40 000 à 90 000

1,1% à 2,4% de la population

ÉGYPTE

5,8 millions à 11 millions

8% à 16% de la population

SYRIE

970 000 à 1,7 million

5,4% à 9,4% de la population

JORDANIE

163 000 à 220 000

3% à 4% de la population

IRAK

700 000 à 1 million

2,7% à 3,5% de la population

IRAN

79 000 à 40 0000

0,1% à 0,6% de la population

SOURCE: BBC