L'élection présidentielle iranienne qui pourrait signer le départ de l'ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad aura lieu le 12 juin prochain. Mais l'avocate Shirin Ebadi ne se fait pas d'illusions: tant que les candidats doivent obtenir l'approbation des mollahs, il n'y a pas lieu d'espérer de changement majeur à Téhéran. Elle pense néanmoins que Washington doit négocier avec l'Iran sans condition. La Presse l'a rencontrée cette semaine, en marge du Sommet du millénaire.

Q- La Presse: Le gouvernement iranien a fermé votre centre de défense des droits de la personne en décembre. Avez-vous pu reprendre vos activités?

 

R- Shirin Ebadi: Le jour où ils sont venus mettre la clé dans la porte, je leur ai dit qu'ils pouvaient fermer mon bureau, mais pas ma bouche. C'est plus difficile de fonctionner sans bureau, mais nous n'avons pas réduit le rythme de nos activités. Au contraire, nous avons récemment lancé une campagne contre la peine capitale appliquée aux mineurs. L'Iran est malheureusement l'un des pays avec le plus haut taux d'exécutions de mineurs. Notre campagne suscite la colère du gouvernement.

Q- Votre sécurité est-elle menacée?

R- Ma sécurité est menacée depuis des années. Le gouvernement veut que je cesse mes activités ou que je quitte le pays. Mais je ne ferai ni l'un ni l'autre.

Q- L'élection du 12 juin vous donne-t-elle l'espoir d'un changement?

R Ces élections ne sont pas libres. Les candidatures doivent être confirmées par le conseil des gardiens de la révolution et les Iraniens ne peuvent voter que pour les candidats qui ont reçu leur assentiment.

Q- Mais l'ancien premier ministre Hossein Moussavi, qui se présente contre Mahmoud Ahmadinejad, n'est-il pas un modéré?

R- Je ne veux ni soutenir ni rejeter les candidats en lice. Moi, je n'ai aucune intention d'aller voter, tant que les élections ne seront pas libres.

Q- Récemment, le président Barack Obama a ouvert la porte au dialogue avec Téhéran. Qu'en pensez-vous?

R- Ce que Barack Obama a dit est très positif. Le discours utilisé par George Bush ne faisait qu'encourager la violence du régime iranien. Mais pour que les choses changent vraiment, des actions doivent suivre.

Q- Quelles actions?

R- Après la révolution iranienne (de 1979), Washington a gelé tous les fonds iraniens aux États-Unis. Le premier geste serait de dégeler ces fonds. Ensuite, le gouvernement américain devrait accepter de discuter avec l'Iran sans condition préalable. Et enfin, les Américains doivent s'asseoir et négocier.