Khaled Kahlout et ses trois fils étaient sortis acheter du pain lorsqu'ils ont été fauchés par un missile israélien. Veuve à 32 ans, avec trois filles à sa seule charge, Manal s'apprête à affronter une vie sans hommes à ses côtés.

Manal Kahlout est l'une des dizaines de femmes qui ont perdu leur époux depuis le début de l'offensive israélienne le 27 décembre dans la bande de Gaza.

Comme elle, la plupart se retrouvent dans l'obligation de veiller aux besoins d'une famille au sein d'une société patriarcale et conservatrice.

«Pourquoi tu nous a quittés, pourquoi!», sanglote Manal. «Mon mari et mes trois fils sont tombés en martyrs et je n'ai plus aucun homme à la maison. Que ferai-je de mes filles, qui va s'occuper de nous?», se lamente-t-elle.

«Quelle est la faute de ces filles pour qu'elle grandissent sans père ni frères?», ajoute-elle.

Son mari et ses trois enfants ont été tués par un missile israélien qui a frappé de plein fouet leur voiture alors qu'ils rentraient chez eux à Gaza après avoir acheté du pain. «Ils ont été déchiquetés», affirme la jeune veuve.

Rassemblées dans une pièce de la modeste maison du beau-frère de la veuve, dans le camp de réfugiés de Jabaliya, des parentes tentent d'apaiser la jeune femme endeuillée. En vain. Manal est inconsolable.

«Sa perte est trop grande pour être supportée par n'importe quel humain», dit l'une d'elles, Oum Mohamad.

Nidaa Hammouda, 20 ans, a elle aussi perdu son mari et ses deux frères, le même jour.

«J'ai été bouleversée d'apprendre leur martyre. J'ai perdu mon mari Ahmad, mes frères Mohamad et Mounir et leur cousin Nasser en même temps», raconte-t-elle.

Les quatre hommes, membres du Hamas, ont péri au premier jour de l'offensive israélienne dans un raid aérien contre un bâtiment abritant une association de soutien aux prisonniers gérée par le mouvement islamiste, qui contrôle Gaza.

«Deux jours avant son martyre, mon mari m'a dit de faire attention à nos deux fils Adnane et Amine et à sa mère, comme s'il savait qu'il allait mourir», confie-t-elle.

La veuve de son frère Mounir, Douaa Hammouda, 27 ans, affirme bravement qu'elle va éduquer ses quatre enfants «dans les mosquées, comme le voulait leur père».

Le mouvement islamiste verse une allocation mensuelle aux familles de ses membres tués dans des attaques israéliennes.

Zakiyeh Al-Madhoun, 60 ans, et sa bru Riham, 24 ans, sont devenues veuves le même jour, lorsqu'une attaque israélienne contre une école de l'ONU à Jabaliya, dans le nord de la bande de Gaza, a fait 43 morts.

«Ils ont été touchés par des éclats en passant dans la rue. La tête de mon mari a été tranchée alors que mon fils Ziyad a été touché au cou», raconte-elle.

Dans la maison endeuillée, Riham, effondrée, enlace son fils Hani et ses filles Arij et Shahad. «Que ferons-nous sans toi Ziyad? Je prie Dieu de me donner le courage d'assumer la responsabilité pour ces orphelins».

«Que Dieu se venge d'Israël. O Dieu rend leurs enfants orphelins comme ils l'ont fait avec nos enfants», crie une tante de Riham en levant les mains au ciel.

Selon Samir Zaqout, psychologue à la Gaza Community Mental Health Programme (GCMHP), de nombreuses veuves souffrent, quelques semaines après la perte de leur époux, de «troubles post-traumatiques».

«Lorsque la veuve ne sait pas de quoi l'avenir sera fait, cela peut lui faire perdre toute envie d'affronter la vie et cela conduit généralement à la dépression», ajoute-il.