La défaite du candidat d'extrême droite (FPÖ) à la présidentielle autrichienne a rassuré dans les capitales européennes, soulagé la fragile coalition centriste au pouvoir à Vienne et contrarié les ambitions du FPÖ, qui se projette maintenant vers les législatives.

Européen convaincu, qui jugeait ce scrutin décisif pour l'avenir de l'Autriche dans l'UE, Alexander Van der Bellen est crédité d'une nette victoire avec 53,3% des voix, selon les projections, contre 46,7% à Norbert Hofer, 45 ans, vice-président du parlement et cadre du Parti de la liberté (FPÖ).

L'ancien patron des Verts autrichiens, qui, à 72 ans, se présentait sans étiquette, voit dans ce résultat «un signal rouge-blanc-rouge (les couleurs autrichiennes, ndlr) de l'Autriche à toutes les capitales de l'Union européenne», a-t-il dit à Vienne.

L'extrême droite autrichienne espérait en effet capitaliser sur un contexte international propice aux formations eurosceptiques et anti-immigration après la victoire du Brexit au Royaume-Uni et celle de Donald Trump aux États-Unis.

Le candidat du FPÖ, qui n'avait pas fait campagne sur le thème d'une sortie de l'UE, entendait aussi incarner la défense de l'emploi, du pouvoir d'achat, le renouveau vis à vis des partis social-démocrate (SPÖ) et conservateur (ÖVP) qui gouvernent l'Autriche depuis des décennies.

Les réactions soulagées, après sa défaite, se sont enchaînées dans l'UE: «Bonne nouvelle pour l'Europe» selon le chef de la diplomatie italienne Paolo Gentiloni; «Clair message pro-européen» pour le président du Parlement européen Martin Schulz.

«Le peuple autrichien a fait le choix de l'Europe et de l'ouverture», s'est félicité le président français François Hollande. Le chef de la diplomatie allemande Frank-Walter Steinmeier a vu dans ce résultat un «bon présage pour l'Europe».

C'était avant l'annonce de la démission du chef du gouvernement italien Matteo Renzi après sa large défaite au référendum sur la réforme constitutionnelle dimanche soir.

«Un gain» pour l'avenir

En mai, lors d'un précédent tour de scrutin, il avait fallu attendre le comptage du vote par correspondance, le lundi, pour départager MM. Hofer et Van der Bellen et consacrer la courte victoire de M. Van der Bellen.

Mais ce second tour avait été annulé en raison d'irrégularités procédurales, à la suite d'un recours du FPÖ.

Cette fois, le score de M. Van der Bellen, un ancien professeur d'université, devrait marquer une nette progression par rapport à son résultat de mai (50,3%).

Alexander Van der Bellen a dit s'attendre à 300 000 votes d'écart avec son adversaire, dix fois plus que lors du second tour du printemps.

Cette fois-ci, le parti d'extrême droite a exclu de contester le résultat. Les scores officiels seront connus lundi.

Le vainqueur a attribué son succès à une forte participation et «à l'engagement de dizaines de milliers» de bénévoles qui ont organisé la mobilisation en sa faveur.

Même si les fonctions du président de la République autrichienne sont essentiellement protocolaires, une élection de Norbert Hofer aurait constitué pour la première fois l'arrivée d'un candidat d'extrême droite à la tête d'un État de l'UE.

À ce titre, elle était très observée par les partis alliés du FPÖ au niveau européen, le Front national (FN) en France ou le parti pour la Liberté de Geert Wilders aux Pays-Bas, deux pays où se tiendront des élections nationales en 2017.

M. Wilders a salué dimanche le FPÖ «qui s'est courageusement battu». «Les prochaines législatives seront celles de leur victoire!», a estimé la présidente du FN, Marine Le Pen.

Autour de Norbert Hofer, «infiniment triste» de sa défaite, les responsables du parti ont pris date pour l'avenir, mettant l'accent sur le potentiel d'une formation qui a séduit pas loin d'un électeur sur deux, «un gain durable pour (...) de possibles législatives», selon le secrétaire général du parti Herbert Kickl.

Dans l'hypothèse de législatives, qui auront lieu au plus tard en 2018, le FPÖ, fondé par d'ex-nazis en 1956 mais qui a lissé son discours, est donné en tête à plus de 30% d'intentions de vote face au SPÖ et à l'ÖVP, dont les ténors soutenaient Van der Bellen.

Ces deux grands partis autrichiens, au pouvoir depuis 2007, évitent d'avoir à cohabiter avec un président d'extrême droite qui aurait pu mettre leur coalition sous une forte pression. Leurs candidats avaient été éliminés dès le premier tour de la présidentielle, le 24 avril.