L'ancien président français Jacques Chirac, 78 ans, n'ira sûrement pas à son procès, qui s'ouvre lundi à Paris pour une affaire d'emplois fictifs: très affaibli, il a demandé à être représenté par ses avocats, dossier médical à l'appui.

L'ancien président dit toutefois vouloir que le procès, déjà reporté en mars, se déroule malgré tout, selon un communiqué de ses avocats, auxquels il a demandé de le «représenter» aux audiences prévues du 5 au 23 septembre au tribunal correctionnel de Paris.

Ce sera au président de la 11e chambre, Dominique Pauthe, d'en décider lundi. Il peut accepter cette demande et laisser le procès se poursuivre ou bien renvoyer les débats, mais il ne fait quasiment aucun doute que M. Chirac ne viendra pas.

Les conseils de Jacques Chirac lui ont remis vendredi «une lettre de (leur) client à laquelle était joint son dossier médical».

L'ancien président y exprime «son souhait de voir le procès aller à son terme et sa volonté d'assumer ses responsabilités même s'il n'a plus l'entière capacité de participer au déroulement des audiences», selon ses avocats.

Selon le quotidien Le Monde, le rapport d'un neurologue, sollicité en juillet par l'épouse et la fille de Jacques Chirac, conclut qu'il est «dans un état de vulnérabilité qui ne lui permet pas de répondre aux questions sur son passé».

«Son état de santé s'est dégradé depuis quelques mois, c'est vrai, et dans ces conditions, sa présence au procès ne peut pas avoir lieu dans des conditions humaines et de dignité», a déclaré samedi à l'AFP Frédéric Salat-Baroux, l'époux de la fille de M. Chirac, Claude.

Mais, «de toutes ses forces, il souhaite que le procès aille à son terme», a-t-il ajouté.

Le procès de Jacques Chirac, premier ancien président de la République à comparaître en justice, avait tourné court pour des raisons de procédure en mars et avait été reporté à lundi.

Sa présence aux audiences était restée incertaine, son état de santé continuant de susciter des spéculations. Des articles de presse ont décrit M. Chirac comme fatigué à son arrivée début août en vacances à Saint-Tropez, dans le sud-est de la France, mais il avait néanmoins signé par la suite des autographes et posé avec les touristes.

Son état s'est «dégradé durant l'été» et il «ne maîtrise pas ses paroles», a indiqué à l'AFP une personne qui le voit régulièrement.

Protégé pendant ses 12 ans à la présidence (1995-2007) par une immunité, Jacques Chirac doit répondre de faits remontant au début des années 1990, quand il était maire de Paris (1977 à 1995).

M. Chirac est soupçonné d'avoir permis que des personnes travaillant essentiellement pour son parti, le RPR (ancêtre de l'UMP, le parti de l'actuel président Nicolas Sarkozy), soient rémunérées par la mairie de Paris.

Il n'a cessé de récuser l'existence d'un «système organisé».

Le procès comprend deux volets. L'un, pour lequel M. Chirac est accusé de «prise illégale d'intérêt», a été instruit à Nanterre (près de Paris) et porte sur sept emplois présumés de complaisance. L'autre, pour lequel l'ex-président est poursuivi pour «détournement de fonds publics» et «abus de confiance», a été instruit à Paris et porte sur 21 emplois.

Renvoyé devant la justice pour «détournement de fonds publics», «abus de confiance» et «prise illégale d'intérêt», Jacques Chirac encourt en théorie dix ans de prison et 150 000 euros d'amende (environ 210 000 dollars canadiens).

Mais le parquet, qui avait requis un non-lieu pendant l'instruction, devrait logiquement demander sa relaxe. Quant à la principale victime, la Ville de Paris, elle a renoncé à se porter partie civile suite à un accord conclu en septembre 2010 avec Jacques Chirac et le parti au pouvoir UMP, l'indemnisant à hauteur de 2,2 millions d'euros (environ 3,1 millions de dollars).

Il reviendra à l'association anticorruption Anticor et à quelques particuliers, qui veulent se constituer partie civile, de porter la contradiction face à la défense.

Samedi, l'avocat d'Anticor Jérôme Karsenti a déploré sur la radio France Info que «du côté de la défense, du côté de ceux qui ont exercé le pouvoir (...) on veu(ille) encore une fois échapper à ce qui est la loi pour tous».