La défense de Ratko Mladic tentait par tous les moyens lundi de retarder le transfèrement de l'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie vers La Haye, qui devrait avoir lieu très prochainement, au lendemain d'un baroud d'honneur des nationalistes serbes.

L'avocat de Ratko Mladic, Me Milos Saljic, a indiqué qu'il ferait appel par lettre recommandée lundi après-midi, d'ici à 16h GMT (midi, heure de Montréal), soit au tout dernier moment, «pour retarder un peu les choses, pour ne pas avoir le transfèrement tout de suite».

Selon lui, le Tribunal serbe pour les crimes de guerre devrait décider mardi de transférer ou non l'ancien militaire vers le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) où il doit répondre de génocide.

«Le tribunal va sans doute décider dans la journée de demain (mardi), car l'appel n'arrivera pas avant demain», a-t-il déclaré.

Les juges ont un délai de trois jours maximum pour se prononcer. Si l'appel est rejeté, le ministère serbe de la Justice signera la décision finale de transfèrement, dans un délai qui peut varier.

La porte-parole du TPIY, Nerma Jelacic, a d'ores et déjà déclaré «douter» que Ratko Mladic puisse arriver lundi à La Haye.

À titre de comparaison, l'arrestation de l'ancien chef politique des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic, a été annoncée le 21 juillet et son transfèrement vers La Haye a eu lieu le 30 juillet.

À La Haye, Ratko Mladic devra répondre notamment de génocide pour le massacre d'environ 8000 hommes et garçons à Srebrenica en 1995, le pire commis en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Il est aussi accusé de crimes contre l'humanité pour son rôle présumé dans la guerre en Bosnie (1992-1995). Il encourt la prison à vie.

La défense de Ratko Mladic, qui a été arrêté jeudi à une centaine de kilomètres de Belgrade après une fuite de près de seize années, tente également de jouer la carte de la santé physique et mentale de son client.

Une demande de création d'une équipe médicale indépendante comprenant notamment un cardiologue, un neurologue et un neuropsychiatre a été déposée afin d'examiner l'état de santé de Ratko Mladic qui est «alarmant», selon Me Saljic.

Il s'est toutefois montré peu optimiste à ce sujet.

De son côté, Bruno Vekaric, le porte-parole du procureur serbe pour les crimes de guerre, a dénoncé à l'AFP la «stratégie dilatoire» de la défense.

«Les problèmes qu'il (Ratko Mladic) a sont habituels pour les gens de son âge qui ne font pas attention à leur santé et il n'y a pas fait attention pendant qu'il se cachait», a-t-il estimé.

Des détails inédits ont par ailleurs émergé sur sa cavale. Selon le président du Conseil national pour la coopération avec le TPIY, Ratko Mladic a indiqué qu'un nombre très restreint de personnes aidait le fugitif. Ce dernier s'est caché jusqu'en 2002 dans des établissements militaires dans des villages du sud-ouest de Belgrade.

Les autorités ont ensuite pu reconstituer son parcours depuis février 2006, de sa cachette dans le village de Ljube (40 km à l'ouest de Belgrade) jusqu'à Lazarevo chez son cousin où il a été arrêté.

Dimanche, les ultra-nationalistes serbes se sont livrés à un baroud d'honneur pour protester contre la «trahison» que constitue à leurs yeux l'arrestation de Ratko Mladic par les autorités serbes.

L'ancien militaire était pour eux la dernière figure majeure du nationalisme serbe des années 90 et de ses guerres encore en liberté.

Mais la faiblesse du rassemblement, qui a réuni de 10000 à 15000 personnes, est un signe du déclin du nationalisme radical, ont indiqué lundi des experts.