Emboîtant le pas à plusieurs autres pays européens, la Finlande a pris un tournant radical lors des élections législatives tenues dimanche en soutenant massivement un parti de droite populiste qui promet de donner du fil à retordre aux autorités européennes.

Le parti des Vrais Finlandais, qui a fait campagne sur une plateforme eurosceptique et nationaliste, est arrivé en troisième position du scrutin avec 19% des voix. La formation, menée par Timo Soini, a ainsi fait presque cinq fois mieux qu'en 2007, se retrouvant en position de faire partie de la prochaine coalition gouvernementale.

Les conservateurs proeuropéens du Parti de la coalition nationale sont arrivés premiers avec 20,4% des bulletins, suivis de près par les sociodémocrates. Le Parti du centre de la chef du gouvernement sortant, Mari Kiviniemi, a perdu 15 sièges. Elle a annoncé qu'elle ne participerait pas à la prochaine coalition, assurant pratiquement l'entrée au gouvernement des troupes de M. Soini.

Vers une coalition

Le charismatique politicien, âgé de 48 ans, a déclaré hier que la performance de son parti lui donnait le droit de participer au gouvernement. Il a souligné du même souffle que les discussions pour parvenir à sa formation seraient «difficiles».

Le parti des Vrais Finlandais, issu du Parti rural finnois, a fortement critiqué en campagne l'Union européenne, s'insurgeant contre la multiplication de plans de sauvetage à l'attention de pays en difficulté comme la Grèce, l'Irlande et, plus récemment, le Portugal.

«On doit traire les vaches finlandaises en Finlande et on ne va pas envoyer leur lait pour faire la charité au-delà des frontières de ce pays», note M. Soini, qui fustige les «dilapidateurs européens».

Des maux de tête pour l'Europe

L'opposition éventuelle du petit pays scandinave pourrait causer de sérieux maux de tête aux autorités européennes, qui projettent, en plus de venir en aide à Lisbonne, de doubler les réserves du Fonds européen de stabilisation financière.

En cas d'abstention de Helsinki, les autres pays pourraient décider d'aller de l'avant, mais ils devraient prendre à leur charge la part prévue pour le gouvernement finlandais. Un scénario improbable dans la mesure où la question du versement de ces aides financières est déjà très sensible, notamment en Allemagne.

La Commission européenne a assuré hier, par l'entremise de sa porte-parole, que les résultats de l'élection n'ont «rien changé» à la situation. «Nous sommes pleinement confiants que la Finlande va continuer à honorer ses engagements», a déclaré Pia Ahrenkilde Hansen.

«Le résultat du scrutin a de quoi donner des cheveux blancs à l'Europe», a déclaré dimanche soir à l'Associated Press un analyste politique finlandais, Olavi Borg.

Le scrutin survient alors que les marchés sont déjà secoués par des rumeurs portant sur une possible restructuration de la dette grecque, le pays peinant à faire face à ses obligations. L'Irlande est aussi en mauvaise posture après avoir révélé que ses banques nécessitent une injection financière additionnelle de 20 milliards d'euros.

Montée nationaliste

Au-delà des considérations financières, l'émergence du parti des Vrais Finlandais marque la plus récente manifestation, à l'échelle européenne, de la popularité croissante de partis véhiculant un discours nationaliste et xénophobe.

Bien qu'il se soit abstenu de parler avec insistance d'immigration durant la campagne, Timo Soini et son parti sont clairement en faveur d'un contrôle sévère des flux migratoires. Selon Jan Sundberg, professeur à l'Université d'Helsinki, ils défendent l'idée que les étrangers s'intègrent mal en Finlande et menacent la culture locale, rejoignant un sentiment assez répandu dans la population.

Lors d'élections tenues en 2010, la droite populiste a aussi enregistré des gains importants en Suède, sans réussir pour autant à se faire une place au gouvernement. Au Danemark, le Parti populaire danois, troisième en importance du pays, appuie de l'extérieur le gouvernement, exerçant une influence marquée sur les orientations du pays en matière d'immigration. L'Italie, les Pays-Bas, la Suisse et la France sont aussi confrontés à une forte montée populiste.