Le président des Etats-Unis Barack Obama et son homologue cubain Raul Castro devraient se rencontrer en fin de semaine au Sommet des Amériques au Panama, une première depuis plus d'un demi-siècle entre ces deux pays qui ont amorcé un rapprochement historique.

Ce Sommet des Amériques des 10 et 11 avril à Panama City, où se rendent 34 dirigeants, prend un relief particulier car il intervient après l'annonce choc le 17 décembre, par les présidents américain et cubain, d'un processus de normalisation entre Washington et La Havane, après plus de 50 ans de crise et de tensions héritées de la Guerre froide.

M. Obama se rendra d'abord cette semaine en Jamaïque, sa première visite depuis son arrivée à la Maison Blanche en 2009 et le premier voyage d'un président américain dans ce pays depuis celui du républicain Ronald Reagan en 1982. L'actuel président démocrate rencontrera le Premier ministre Portia Simpson-Miller et les dirigeants des Etats de la Communauté des Caraïbes (Caricom).

Quant à une rencontre formelle avec le chef de l'Etat cubain au Panama, «le président Obama savait en décidant de se rendre au Sommet (des Amériques) que Cuba y était invité et qu'il y aurait une interaction», a confié vendredi la secrétaire d'Etat adjointe américaine pour l'Amérique latine, Roberta Jacobson.

«Les dirigeants seront ensemble la majeure partie du temps. Il y aura donc un échange avec Raul Castro», a-t-elle annoncé. Elle a cependant reconnu «ne pas savoir exactement de quel genre d'interaction il s'agira» entre deux dirigeants de régimes encore ennemis.

MM. Obama et Castro, qui avaient annoncé simultanément le 17 décembre 2014 le processus de rapprochement, s'étaient brièvement serré la main un an plus tôt à Johannesburg lors des cérémonies pour la mort de l'ancien président sud-africain Nelson Mandela.

Rencontre significative

Cette fois, Washington et La Havane cherchent quelque chose de plus significatif.

«C'est utile évidemment d'avoir ce contact pour que les choses se fassent, qu'on ouvre les ambassades et que la relation aille de l'avant», a expliqué Mme Jacobson.

Les deux pays ont eu en janvier, février et mars des négociations officielles en vue d'un rétablissement de leurs relations diplomatiques et la réouverture de leurs ambassades. Un premier dialogue sur les droits de l'homme s'est aussi tenu le 31 mars.

Fin février, Washington s'était donné comme objectif de rouvrir sa chancellerie à La Havane avant le Sommet des Amériques. Cuba ferait de même avec son ambassade à Washington.

Mais le département d'Etat s'est montré sceptique vendredi. «Le Sommet commence dans six jours (...). C'est imminent (...). Cela ne laisse pas beaucoup de temps», a concédé sa porte-parole Marie Harf.

Les Etats-Unis et Cuba, qui ont rompu leurs relations diplomatiques en 1961, entretiennent toutefois depuis 1977 des sections d'intérêts qui font office de chancelleries.

Mais les contentieux restent légion.

Cuba réclame d'être effacé d'une liste américaine des «Etats soutiens du terrorisme» où elle figure avec l'Iran, la Syrie et le Soudan.

Embargo américain

Et malgré la levée ces dernières semaines de sanctions commerciales américaines contre Cuba, les Etats-Unis continuent d'imposer à l'île communiste un embargo économique et financier remontant à 1962.

La Havane demande sa levée, le président Obama y est favorable et a demandé au Congrès, aux mains des républicains, d'y travailler.

Des élus républicains et démocrates veulent également en finir avec l'embargo mais ils sont aussi nombreux dans les deux camps à y être opposés. Ces derniers dénoncent un rapprochement diplomatique sans dialogue préalable avec le régime castriste sur les droits de l'homme et la répression politique.

D'ailleurs, des groupes de dissidents cubains, dont le mouvement des Dames en blanc hostile à l'ouverture américaine, sont invités à une réunion en marge du Sommet des Amériques. M. Obama devrait s'y exprimer et répondre à des questions, mais sans la presse.

Le Venezuela constitue aussi un dossier sensible entre les Etats-Unis et l'Amérique latine.

Les relations entre Caracas et Washington sont exécrables et le président Obama a pris en mars de nouvelles sanctions contre des cadres du régime du président Nicolas Maduro, accusés de violations des droits de l'homme. M. Obama avait même dénoncé dans un décret une «menace inhabituelle et extraordinaire contre la sécurité» des Etats-Unis.

Cuba et son ex-président Fidel Castro avaient immédiatement volé au secours de l'allié vénézuélien et plusieurs organisations régionales d'Amérique latine et des Caraïbes ont fustigé les mesures de Washington.