Après Ferguson, New York attend à son tour avec appréhension la décision d'un grand jury, en liaison avec la mort d'un père de famille noir lors d'une interpellation musclée en juillet dernier.

Soupçonné de vente illégale de cigarettes, Eric Garner, 43 ans, qui avait brièvement tenté de résister, avait été plaqué au sol par plusieurs policiers blancs le 17 juillet à Staten Island, l'un des arrondissements de New York. Dans une vidéo amateur, on voit l'un d'eux le prendre par le cou pour le mettre à terre. «Je ne peux pas respirer», se plaint à plusieurs reprises Eric Garner, père de six enfants, obèse et asthmatique, avant de perdre connaissance. Il avait été déclaré mort après son transfert à l'hôpital.

Le médecin légiste à New York avait conclu à un homicide.

Des milliers de manifestants, organisés en petits groupes extrêmement rapides, ont protesté ces derniers jours à New York contre la décision de ne pas poursuivre le policier blanc ayant tué par balles Michael Brown, un noir de 18 ans, à Ferguson (Missouri, centre) en août.

Un de ces groupes a même essayé de perturber la parade de Thanksgiving jeudi, un autre a manifesté dans le grand magasin Macy's à l'occasion de «Black Friday», la journée de soldes monstres suivant Thanksgiving. Et une petite manifestation a encore eu lieu samedi à Harlem.

Les autorités de New York se préparent à de nouvelles protestations, si le grand jury de Staten Island décide de ne pas poursuivre Daniel Pantaleo, le policier de 29 ans vu sur la vidéo saisir Eric Garner par le cou, pratique pourtant interdite au sein de la police new-yorkaise.

Compte à rebours

Aucune date n'a été annoncée pour sa décision. «Nous ne commentons pas sur le grand jury», a indiqué lundi un porte-parole du procureur.

Mais les médias locaux anticipent une décision prochaine, alors que le grand jury a commencé à se réunir en septembre.

Et l'activiste des droits civiques Al Sharpton a annoncé samedi un «compte à rebours» jusqu'à la décision, en recevant dans les locaux de son association «National Action Network» à Harlem, la mère d'Eric Garner, Gwen Carr, son épouse Esaw, et une soeur d'Akai Gurley, un Noir de 28 ans tué par accident par un policier débutant lors d'une patrouille dans une HLM de Brooklyn le 21 novembre.

«Pouvons-nous montrer quelque chose de différent à New York ?», a interrogé Al Sharpton, un proche du maire de New York Bill de Blasio. «Nous ne voulons pas de violence, mais nous voulons la justice», a-t-il ajouté lors de cette rencontre.

La mère d'Eric Garner a elle confié son espoir d'une «décision juste».

«En aucun cas ils ne doivent revenir (de leurs délibérations) sans inculper ce policier», a déclaré Gwen Carr.

Les petits groupes de manifestants qui, partant de Times Square ou Union Square, ont sillonné Manhattan après la décision de Ferguson, bloquant un soir la voie express FDR Drive à Manhattan ou le Lincoln Tunnel, associaient souvent les trois hommes, Michael Brown, Eric Garner et Akai Gurley.

Une trentaine de personnes ont été interpellées durant ces manifestations qui ont réuni Noirs, Latinos, étudiants blancs, anarchistes et anciens membres d'Occupy.

Dans le cas d'Eric Garner, l'annonce de la constitution d'un grand jury - assemblée de citoyens américains chargés de décider ou non d'une inculpation sur la base des éléments de l'enquête - avait été annoncée le 19 août par le procureur de Staten Island, plus d'un mois après le drame, et quatre jours avant une manifestation ayant réuni des milliers de protestataires à Staten Island aux cris de «pas de justice, pas de paix».