Quand il a vu un bébé otarie à plus de 11 kilomètres des côtes, dans un magasin de téléphonie, non loin de l'ancien club de foot californien de David Beckham, Peter Wallerstein s'est dit qu'il se passait quelque chose de grave.

Ces animaux affamés sont de plus en plus nombreux depuis janvier à échouer le long des côtes de l'État de Californie. D'habitude on les retrouve sur les plages. Maintenant ils sont partout, et par centaines.

«Je n'étais pas trop inquiet au début», raconte à l'AFP M. Wallertsein, 61 ans, membre d'une association de sauvetage des animaux marins. «Mais quand on a commencé à recevoir 75 à 100 appels par jour et qu'on a trouvé des animaux près du magasin (de téléphonie) de Carson et sous les voitures, j'ai dû lancer un signal d'alarme».

La ville de Carson, située à 32 kilomètres au sud de Los Angeles, abrite le club de football LA Galaxy, dans lequel Beckham jouait encore l'an dernier, à plusieurs kilomètres de la mer.

Normalement, les sauveteurs ne voient apparaître des bébés qu'en avril. Ils naissent en juin, puis leurs mères les nourrissent tout l'hiver, avant de les laisser se débrouiller seuls au printemps.

«Cette année, nous avons commencé à voir des bébés (...) âgés de 6 mois dès janvier», explique la biologiste Sharon Melin, du service national des pêches.

«Et ça a continué à augmenter depuis», ajoute-t-elle depuis Seattle, en évoquant deux hypothèses: la maladie ou le manque de nourriture.

Pour les autorités, il s'agit d'un «événement inhabituel de mortalité», un qualificatif rarement utilisé. «Ce qui rend l'événement atypique c'est l'âge et le type d'animaux, et le fait que ça ait commencé si tôt», ajoute Mme Melin, pour qui il n'y a pas «d'événement à l'échelle régionale qui pourrait expliquer» cette migration.

La moitié de leur poids normal

Après avoir recueilli les otaries abandonnées, M. Wallerstein les a emmenées au centre de soins pour mammifères marins de San Pedro, où son directeur David Bard affirme que les bébés pesaient la moitié de leur poids normal - qui est de 20 à 25 kilogrammes.

«D'habitude au cours des premiers mois de l'année, nous voyons entre 50 et 80 animaux. Cette année, à la fin mars, nous en avions accueilli 400», a-t-il précisé à l'AFP.

Les otaries vivent dans des enclos avec un bassin. Les plus petites et les plus fragiles sont surveillées constamment dans des unités séparées.

«Notre objectif est d'en soigner autant que possible et de les renvoyer dans leur milieu naturel, ce qui prend entre un et trois mois», explique M. Bard.

Des otaries mourront. Et certaines seront euthanasiées «quand un animal souffre toujours et que nous ne pouvons pas le soigner», selon M. Bard.

Au pire de la crise, il n'y avait pas assez d'espace pour les accueillir, se souvient M. Wallerstein. «Nous étions comme des médecins sans hôpitaux. C'était dur, nous devions renvoyer des animaux (...) qui n'étaient pas bien» vers des plages moins exposées, mais sans soins. «Nous n'avions pas d'autres choix».

D'après Jim Milbury, des services de météorologie de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration), 1 098 bébés otaries ont échoué sur la côte entre Santa Barbara et San Diego entre janvier et mars. Contre 131 en moyenne.

Toutefois la semaine dernière, le nombre de sauvetages a singulièrement baissé, selon M. Wallerstein. Même si, selon Mme Melin, les chiffres pourraient à nouveau croître, avec le début de la traditionnelle saison du sevrage.

Quant aux origines - mystérieuses - du phénomène, la biologiste assure qu'elle en saura davantage «dans quelques mois».

PHOTO JOE KLAMAR, AFP

Un jeune bébé otarie en rémission plonge dans un bassin d'eau au Centre de soins pour animaux marins de Fort MacArthur à San Pedro, Californie.