La possibilité que le président américain Barack Obama ait à procéder cet été à une deuxième nomination à la Cour suprême se rapproche, depuis que le doyen de l'institution John Paul Stevens a laissé entendre qu'il pourrait partir, dans une interview à l'hebdomadaire New Yorker.

John Paul Stevens va fêter ses 90 ans le 20 avril. Ce juge respecté, nommé en 1975 par le président républicain Gerald Ford, est devenu au fil du temps la plus solide figure du camp progressiste de la plus haute juridiction des États-Unis.

Alors que les rumeurs allaient déjà bon train à Washington, il confirme dans un entretien accordé au New Yorker à paraître lundi n'avoir embauché qu'un seul assistant pour la session 2010-2011, ce qui est généralement considéré comme prémisses d'un départ à la retraite.

M. Stevens garde néanmoins le suspens: «mes possibilités sont toujours ouvertes, quand j'ai décidé de n'embaucher qu'un seul assistant, trois des quatre qui travaillent avec moi cette année ont accepté de continuer l'année prochaine si je le souhaitais», explique-t-il.

«Je prendrais une décision bientôt», ajoute-t-il, dans un mois selon l'auteur de l'interview, le spécialiste de la Cour suprême Jeffrey Toobin. «Vous pouvez écrire que je partirai d'ici trois ans», précise encore le juge Stevens en référence au mandat de Barack Obama qui prendra fin en 2013.

Le nom d'Elena Kagan, ancienne doyenne de la faculté de droit d'Harvard, 50 ans, actuellement représentante de l'administration Obama devant les neuf sages, est le plus couramment cité pour lui succéder.

L'été dernier, le président américain avait procédé à sa première nomination à la Cour suprême en désignant Sonia Sotomayor, première juge d'origine hispanique.

Même s'il nommait une personnalité de gauche pour lui succéder, John Paul Stevens a acquis un statut irremplaçable de chef de file de l'opposition interne, au sein d'une Cour qui penche de plus en plus du côté conservateur.

Alors que les observateurs ne s'attendaient pas à ce qu'il confie la nomination de son successeur à George W. Bush, M. Stevens décrit sa «grande admiration» pour Barack Obama: «Il a la compétence pour faire le bon choix, pour oeuvrer dans le bon sens et pourvoir le poste vacant».

Personnage haut en couleurs, amateur de tennis et travailleur infatigable, John Paul Stevens a récemment rédigé plusieurs décisions condamnant la peine de mort.

En 2008, tout en reconnaissant la légalité de l'injection mortelle, il avait notamment estimé qu'«imposer la peine de mort représente la manière la plus absurde et inutile d'éteindre la vie, participant de manière uniquement marginale à un quelconque intérêt public et social perceptible».

Il est aussi l'auteur de deux décisions historiques en 2004 et 2006 qui ont opposé un revers à la manière dont l'administration Bush menait sa «guerre contre le terrorisme».

Minoritaire en 2000 dans la célèbre décision Bush contre Gore, qui avait donné la victoire à George W. Bush au détriment d'Al Gore, il avait affirmé: «bien qu'il est probable qu'on ne connaisse jamais l'identité du vainqueur de cette élection présidentielle, l'identité du vaincu est évidente. C'est la confiance de la nation dans ses juges, comme gardiens impartiaux de l'État de droit».