Des raids aériens et des bombardements ont frappé lundi soir les quartiers rebelles d'Alep, moins de deux heures après l'annonce par l'armée de la « fin » du cessez-le-feu qui aura duré une semaine, selon le correspondant de l'AFP.

Les raids incessants ont visé plusieurs quartiers rebelles dans l'est de la ville, a rapporté ce correspondant. Selon lui, les bombardements sont intenses et les sirènes des ambulances ont été entendues partout alors que des incendies se sont déclarés dans plusieurs parties du secteur rebelle.

L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) a confirmé les raids et les bombardements sur la ville et dans la province à l'ouest et au sud de la ville. Il n'était pas en mesure de déterminer la nationalité des appareils.

La ville d'Alep est divisée depuis juillet 2012 en quartiers aux mains des rebelles et ceux contrôlés par le régime.

L'armée syrienne a déclaré lundi la « fin » de la trêve des combats initiée il y a une semaine par les États-Unis et la Russie, qui s'accusent mutuellement de l'échec de cette énième tentative pour mettre fin au conflit.

L'armée du régime de Bachar al-Assad « annonce la fin du gel des combats qui a débuté à 19 h (midi, heure de Montréal) le 12 septembre conformément à l'accord États-Unis/Russie », a-t-elle indiqué à Damas une heure avant son expiration.

Cette annonce laisse présager une reprise de plus belle des combats qui ont fait plus de 300 000 morts et dévasté la Syrie depuis mars 2011.

Les tirs ont d'ailleurs repris depuis dimanche dans la ville d'Alep, épicentre du conflit, et des combats ont eu lieu à la périphérie de Damas.

La fin de la trêve survient alors que les timides espoirs suscités initialement par l'accord russo-américain s'étaient nettement refroidis ces derniers jours avec la reprise des combats et des échanges virulents entre les deux grandes puissances.

Le chef de la diplomatie américaine John Kerry avait pourtant assuré lundi vouloir encore croire au maintien de la trêve. Elle « tient, mais reste fragile », a-t-il déclaré à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU où le dossier syrien tiendra une grande place.

Mais la Russie s'était montrée nettement moins optimiste, multipliant ses critiques vis-à-vis de Washington et de ses alliés.

Le général Sergueï Roudskoï a ainsi déclaré que « compte tenu du fait que les rebelles ne respectent pas le régime de cessez-le-feu, son respect unilatéral par les forces gouvernementales syriennes n'a pas de sens ».

« Agression flagrante »

En annonçant la fin de la trêve, l'armée syrienne en a fait porter la responsabilité aux groupes rebelles qui n'ont « pas respecté une seule disposition » de l'accord. Damas a répertorié plus de 300 violations de la trêve par ces groupes.

Les rebelles et l'opposition n'avaient pas formellement approuvé l'accord russo-américain, dont ils critiquaient l'absence de garanties qu'il soit effectivement appliqué par le régime et ses alliés.

Un peu avant l'annonce de son armée, le président Assad a accusé les États-Unis d'avoir commis une « agression flagrante » en menant samedi un raid contre son armée à Deir Ezzor, dans l'est de la Syrie, qui a fait au moins 90 morts.

La coalition a affirmé que ce bombardement était une erreur de cible puisqu'elle croyait viser des djihadistes du groupe État islamique (EI), présents dans la zone. Mais Damas a rejeté cette explication en dénonçant un raid « délibéré » selon la conseillère du président Assad, Bouthaina Chaabane

À la faveur de ces frappes, les djihadistes du groupe État islamique (EI) ont réussi à s'emparer du mont Thourda, qui domine l'aéroport de Deir Ezzor tenu par le régime, selon une source militaire. Avec cette position, les djihadistes peuvent empêcher les mouvements des avions et des hélicoptères.

La Russie a par ailleurs accusé les États-Unis de n'avoir pas réussi à obtenir que l'opposition modérée prenne ses distances avec des groupes djihadistes, dont l'ex-Front al-Nosra, qui a changé son nom en Front Fateh al-Cham depuis sa rupture officielle avec Al-Qaïda. « Au contraire, la partie russe observe une alliance et une préparation en cours pour une offensive conjointe », a dénoncé le général Roudskoï.

Pas d'aide à Alep

Un autre objectif de la trêve était l'acheminement de l'aide humanitaire vers les villes assiégées, mais celui-ci ne s'est fait qu'au compte-goutte. Et, surtout, aucun des camions remplis de nourriture et de médicaments n'a pu rejoindre les quartiers rebelles d'Alep, pourtant une priorité absolue selon l'accord de cessez-le-feu.

« Nous sommes bien sûr frustrés par le fait qu'il n'y a aucun progrès concernant Alep », a déclaré à l'AFP David Swanson, un porte-parole du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA).

Cette aide était attendue avec impatience par les habitants, à l'instar de Mohammad Saber, qui vend des arachides et des pistaches dans le quartier rebelle de Boustane al-Qasr. « Je n'ai plus rien dans mon magasin. Je l'ouvre quelques heures par jour pour passer le temps, car rester chez moi me déprime. Il y un mois que je n'ai pas été livré », se désole le commerçant, assis devant son échoppe, une cigarette à la main.

À Alep comme sur d'autres fronts, les accrochages se sont multipliés ces derniers jours. Dans le secteur rebelle d'Alep, un enfant a été tué par des tirs dans le quartier de Layaramon et 6 personnes ont été blessées à Boustane al-Qasr. Des tireurs embusqués rebelles ont tiré sur le quartier gouvernemental de Macharaka sans faire de victime, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

Des combats ont également eu lieu au sud d'Alep entre forces du régime et insurgés, ainsi qu'à Jobar, un quartier périphérique de l'est de Damas.

Au total en une semaine de trêve, 27 civils, dont 9 enfants, ont perdu la vie, selon l'OSDH.