Pourquoi distinguer officiellement une récente fuite d'eau radioactive à Fukushima alors que maints autres incidents ne l'ont pas été avant, a souligné l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) dans une réponse écrite à l'autorité de régulation nucléaire japonaise dont la façon de communiquer est critiquée.

La semaine passée, le régulateur japonais avait situé au niveau 3 («incident grave») sur l'échelle internationale des événements nucléaires (Ines) une fuite de 300 tonnes d'eau hautement radioactive depuis un gigantesque réservoir cylindrique à la centrale nucléaire accidentée Fukushima Daiichi.

Cette évaluation a été confirmée mercredi.

L'autorité avait décidé au préalable d'interroger l'AIEA sur la pertinence d'utiliser l'échelle Ines pour distinguer cet incident.

«L'application de l'échelle Ines et la détermination d'une note Ines sont une responsabilité nationale», a répondu l'AIEA par écrit, selon des documents publiés mercredi par l'autorité nippone.

Mais, soulignant que les incidents se sont multipliés à Fukushima et que cette fuite n'est qu'un énième problème du genre, l'AIEA insiste sur le fait que «la plus haute priorité est maintenant d'atténuer les conséquences de la fuite et de prendre des mesures pour empêcher que cela se reproduise».

Et l'AIEA de s'interroger toutefois sur la façon dont les autorités entendent expliquer au public et aux médias «pourquoi ils veulent noter cet événement, tandis que des faits similaires précédents ne l'ont pas été».

«Plutôt que d'utiliser l'Ines comme un outil de communication pour noter chaque événement, il serait possible d'élaborer un plan de communication pour expliquer la signification de chaque problème en termes de sûreté», a écrit l'AIEA à l'autorité nippone.

Et pour être bien comprise, elle poursuit: «Cela permettrait d'éviter d'envoyer des messages contradictoires aux médias et au public sur une longue série d'événements notés sur l'échelle Ines».

L'AIEA met enfin en garde contre l'adoption d'une stratégie de notation en fonction de critères plus ou moins précis, «les fréquents changements de note n'aidant pas à faire état de la situation réelle d'une manière claire».

Ces remarques interviennent alors que, comme l'a reconnu le président de l'Autorité, Shunichi Tanaka lors d'une conférence de presse, la lumière est loin d'être faite sur cette fuite.

«Ce qui se passe à Fukushima suscite un grand intérêt au Japon et à l'étranger. Il est vrai qu'il est important de communiquer au bon moment et d'une façon claire», a convenu M. Tanaka lors de la réunion hebdomadaire des membres de l'instance de régulation, leur demandant de réfléchir à une stratégie cohérente.

En attendant, les autorités locales sont particulièrement remontées contre l'opérateur de la centrale, Tokyo Electric Power Co (Tepco).

«Je veux que le gouvernement comprenne qu'il s'agit d'une situation d'urgence et prenne les mesures nécessaires pour en venir à bout», a réagi Yuhei Sato, gouverneur de la préfecture de Fukushima.

«Tepco est une entreprise qui ment et je doute de sa capacité à exploiter un complexe nucléaire de façon sûre», a pour sa part déclaré Hirohiko Izumida, son homologue de la préfecture de Niigata (nord-ouest), la région qui héberge la plus grande centrale de l'archipel, Kashiwazaki-Kariwa, également propriété de Tepco.

Ce site à sept réacteurs est actuellement totalement arrêté par précaution.

Au cours d'une visite au Qatar, le Premier ministre Shinzo Abe a déclaré mercredi que le gouvernement japonais allait devoir s'impliquer davantage dans les opérations de nettoyage de Fukushima.

«Il est nécessaire pour l'État de traiter le problème avec le sentiment de l'urgence et de ne pas simplement le laisser entièrement à Tokyo Electric Power Company», a estimé M. Abe au cours d'une conférence de presse, selon l'agence de presse japonaise Kyodo.

Le chef du gouvernement japonais a ajouté que les informations sur les opérations de nettoyage en cours seraient «diffusées de manière exhaustive» aussi bien au Japon qu'à l'étranger.