(Séoul) La Corée du Nord a tiré deux nouveaux missiles balistiques dans la nuit de samedi à dimanche, quelques heures après la fin de manœuvres militaires conjointes ayant impliqué un porte-avions nucléaire américain au large de la péninsule coréenne.

Samedi, Pyongyang avait défendu la récente accélération de ses essais d’armement, évoquant une « réaction légitime » face à des « menaces militaires directes des États-Unis ». Il s’agit du septième tir de missiles en deux semaines.

Face à des négociations internationales dans l’impasse, Pyongyang a intensifié ses programmes d’armement interdits, tirant un missile balistique de portée intermédiaire passé au-dessus du Japon la semaine dernière. Et des responsables et experts ont averti que le régime nord-coréen avait achevé les préparatifs d’un nouvel essai nucléaire.

L’armée sud-coréenne a communiqué dimanche avoir « détecté entre 1 h 48 et 1 h 58 (16 h 48 et 16 h 58 GMT) deux missiles balistiques de courte portée tirés depuis la zone de Munchon dans la province de Kangwon vers la mer de l’Est », aussi appelée mer du Japon.

Les missiles « ont volé (sur une distance) d’approximativement 350 kilomètres à une altitude de 90 kilomètres », a rapporté l’état-major interarmes de Séoul, évoquant une « grave provocation ».

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L’armée sud-coréenne a lancé mercredi plusieurs missiles lors d’un exercice conjoint avec l’armée américaine.

Tokyo a confirmé le tir des deux missiles, les gardes-côtes japonais affirmant qu’ils semblaient être retombés hors de la zone économique exclusive japonaise.

Le vice-ministre de la défense japonais, Toshiro Ino, a indiqué que Tokyo analysait les missiles, ajoutant que « l’un ou l’autre pourrait être un missile balistique lancé par un sous-marin (SLBM) ».

Séoul avait déclaré le mois dernier avoir détecté des éléments indiquant que le Nord se préparait à tirer un SLBM, engin que Pyongyang a testé pour la dernière fois en mai.

Le porte-parole de la Maison-Blanche chargé des questions de sécurité nationale, John Kirby, a dit dimanche sur ABC News que le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un avait refusé les appels au dialogue de Washington et choisi d’« améliorer » son programme de missiles balistiques, sans « abandonner ses ambitions d’armement nucléaire ».  

Les États-Unis privilégieront « la voie diplomatique », a précisé M. Kirby, tout en s’assurant d’avoir les « capacités en place pour défendre (leur) intégrité nationale s’il le faut. Mais il n’y a pas de raison qu’on en arrive là ».

Essais et exercices

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Le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un

Les tirs de missiles de la Corée du Nord visent habituellement à développer de nouvelles capacités. Mais ses essais récents « depuis différents endroits et à des moments différents de la journée peuvent avoir pour objectif de démontrer (leur) état de préparation militaire », estime Leif-Eric Easley, professeur à l’université Ewha de Seoul.

« Ce n’est pas simplement à des fins d’autodéfense et de dissuasion comme le prétend Pyongyang », selon M. Easley. « Le régime de Kim tente de contraindre Séoul, Tokyo et Washington à abandonner leur coopération sécuritaire ».

Lors d’une réunion d’urgence du Conseil national de sécurité de Séoul après l’essai du missile, les responsables sud-coréens ont promis de renforcer cette coopération, selon un communiqué.

La Corée du Nord a mené depuis le début de l’année un nombre record d’essais et adopté en septembre une nouvelle doctrine affirmant que son statut de puissance nucléaire est « irréversible ».

En réponse à cette menace croissante, Séoul, Tokyo et Washington ont conduit des manœuvres militaires conjointes : le porte-avions nucléaire américain USS Ronald Reagan et son groupe de frappe ont été redéployés dans la zone la semaine dernière.

Selon des analystes, Pyongyang a profité des dissensions au Conseil de sécurité des Nations unies pour procéder à des tests d’armes toujours plus poussés.

La semaine dernière, le Conseil s’était réuni d’urgence après le survol du Japon par un missile nord-coréen. La Chine, alliée historique de Pyongyang, avait alors reproché à Washington d’avoir provoqué les lancements avec ses manœuvres militaires.

En mai, la Chine et la Russie avaient opposé leur veto à un renforcement des sanctions contre Pyongyang réclamé par Washington.

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Le porte-avions américain USS Ronald Reagan

Selon Soo Kim, analyste chez RAND Corporation, Kim Jong-un bénéficie des mauvaises relations des États-Unis avec la Russie et la Chine. Pour elle, « il est donc peu probable que nous voyions Moscou ou Pékin soutenir les États-Unis sur la question nord-coréenne de si tôt ».

Séoul et Washington préviennent depuis des mois que Pyongyang procédera à un nouvel essai nucléaire, probablement après le congrès du Parti communiste chinois (PCC) devant s’ouvrir le 16 octobre.

« Une série de tests de missiles comme celle que nous avons vue pourrait être le signe d’une préparation à un essai nucléaire, mais il est assez difficile de prédire le (calendrier) avec précision », explique Ankit Panda, analyste pour la Fondation Carnegie pour la paix internationale.

Selon lui, « un essai peut avoir lieu presque immédiatement après que Kim en ait donné l’ordre ».