(Sabaneta) « Vive Chavez ! », crie Jorge Arreaza devant l’imposante statue en bronze et granit de Hugo Chavez qui trône au centre de Sabaneta, la ville natale du feu président (1999-2013). Candidat au gouvernorat de l’État de Barinas, ce poids lourd du pouvoir est aussi le père du petit-fils du « Comandante ».

Chemise rouge avec une manche sur laquelle est apposée la signature de Chavez, Arreaza cherche les symboles et… les électeurs, usant aussi de la rhétorique socialiste de son père spirituel dont il a été le gendre (il est divorcé de sa fille).

« Nous ne pouvons décevoir le commandant Hugo Chavez. Il faut voter camarades. Tous ! Toutes ! Nous allons flanquer une rouste à l’opposition », dit-il.

Ancien vice-président, ancien ministre des Affaires étrangères, aujourd’hui ministre de l’Industrie, Arreaza est souvent perçu rigide par l’opposition et de nombreux observateurs, mais il est considéré par ses partisans comme un des gardiens du temple chaviste. Et s’il est important dans l’État de Barinas (non loin de la Colombie), fief de la famille, il est est capital à Sabaneta, 280 000 habitants, où Chavez est né en 1954.

Ici, Chavez est partout : sur les panneaux à l’entrée de la ville, sur les murs colorés en train de jouer de la Cuatro (guitare à 4 cordes), enfant en uniforme militaire avec son célèbre béret, ou jouant au baseball.

Depuis sa mort d’un cancer en 2013, son successeur Nicolas Maduro a tenté de transformer la cité en lieu de culte. Un itinéraire touristique retrace le parcours de Chavez de la maison de sa grand-mère à son école en passant par l’église où il a été enfant de chœur, et jusqu’à sa statue où Jorge Arreaza galvanise ses troupes.

« L’espoir est de retour »

Mais, berceau de Chavez ou pas, la cité ne fait pas exception et a été touchée de plein fouet par la crise économique sans précédent qui a fait chuter le PIB par habitant de ce pays producteur de pétrole au niveau de Haïti.

« On n’a pas le courant », se plaint une habitante en assistant au passage du cortège de campagne d’Arreaza, qui salue les habitants suivis de centaines de partisans en moto.

« L’espoir est de retour » est son slogan de campagne. Une formule soigneusement choisie qui fait allusion à Chavez, mais aussi à un besoin de changement alors que la famille de Chavez gouverne l’État depuis 1998.

En novembre dernier lors des élections régionales et municipales, l’opposition était sur le point d’être déclarée vainqueur de l’État de Barinas quand le Tribunal suprême a ordonné l’arrêt du comptage des voix. Il a déclaré le candidat opposant Freddy Superlano « inéligible » alors que celui-ci était légèrement en tête après le dépouillement de 90 % des bulletins.

La nouvelle élection le 9 janvier a lieu sans Superlano, mais aussi sans Argenis Chavez, frère d’Hugo Chavez, gouverneur de 2017 à 2021 et candidat à sa succession. Il a passé la main à Arreaza après la décision de justice.

Avant lui, l’État était gouverné par l’autre frère Chavez, Adan (2008-2016), et avant lui par le père de Hugo Chavez, Hugo de los Reyes Chavez (1998-2008).

Lors des municipales de novembre, le parti de Chavez et d’Arreaza a remporté le scrutin à Sabaneta, et malgré les problèmes, l’ex-gendre est en terrain conquis.

Ici, il n’y a d’autres affiches de campagne que celles d’Arreaza. « J’ai super confiance en Arreaza. Il va se bouger », déclare Juan Antonio Lucena, chauffeur à la retraite de 66 ans, assurant être « 100 % chaviste » et avoir joué au softball avec l’ancien président.

Si Arreaza est originaire de Caracas, il peut se targuer de liens étroits avec le « Comandante » et sa famille. Il est le père de Jorge Arreaza Chavez, le premier petit-fils de Chavez qui le surnommait « El Gallito » (le petit coq).

Pour l’élu local Reinaldo Chavez, la quasi-victoire de l’opposition a été « une sonnette d’alarme » après avoir été « sans doute gagné par le triomphalisme » et un excès de confiance.

Il faut à Arreaza remonter le terrain perdu par la famille, l’usure de plus de 20 ans de pouvoir et des accusations de corruption et de clientélisme.

Edixon Nieto, agriculteur de 22 ans a voté pour l’opposition en novembre et le refera dimanche : « je ne vais pas mentir, ici à Sabaneta on est mal. La nourriture est chère. Tout est cher ».