Les heurts entre partisans des rivaux du second tour de la présidentielle ivoirienne de dimanche, le chef de l'État Laurent Gbagbo et l'opposant Alassane Ouattara, ont fait jeudi leur premier mort dans l'ouest, fief de M. Gbagbo, qui a annoncé un couvre-feu après le scrutin.

Un jeune sympathisant du président a trouvé la mort après avoir été agressé par un militant d'opposition à l'issue d'affrontements entre leurs groupes, pour avoir arraché une affiche de campagne de M. Ouattara, a indiqué un agent de la sous-préfecture de Bayota, localité située à 300 km à l'ouest d'Abidjan, joint au téléphone par l'AFP.

Dans un communiqué publié dans la soirée, le ministère de l'Intérieur a confirmé ce décès et précisé que la gendarmerie avait «interpellé les principaux organisateurs».

À trois jours du second tour, il s'agit du premier décès survenu dans les heurts qui opposent depuis une semaine militants du président sortant Gbagbo et de l'ex-premier ministre Ouattara à Abidjan et ailleurs au pays. Jusqu'ici, les violences n'avaient fait que des blessés.

Ce décès est survenu dans les zones forestières du centre-ouest qui sont l'un des points les plus chauds du moment. Dans ces régions de culture du cacao cohabitent autochtones bété (ethnie de M. Gbagbo), baoulé et nordistes qui forment le gros de l'électorat de M. Ouattara.

Jeudi soir, à l'ouverture du débat avec son rival sur la télévision publique -le premier du genre dans le pays-, le chef de l'État a annoncé l'instauration d'un couvre-feu dimanche, soir du scrutin.

«Il faut que les élections aient lieu, mais il faut qu'à partir de 22h00 (heures locale; 17h00, heure de Montréal), le temps que les urnes soient revenues (des bureaux de vote), il y ait le couvre-feu pour que les rues soient libres et que les policiers et les gendarmes patrouillent», a-t-il expliqué, sans préciser les termes de cette mesure.

Son concurrent a regretté une décision qui «dramatise les choses» alors que les incidents actuels sont «localisés».

Tout en gardant un ton mesuré, les deux candidats se sont de nouveau accusés mutuellement d'être responsables des crises qu'a traversées le pays depuis le coup d'État de 1999, comme ils le font depuis une semaine.

L'ONU, des organisations de la société civile et même l'équipe nationale de football ont multiplié cette semaine les appels au calme après la soudaine montée de tension dans les discours et à travers le pays.

Jeudi, la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, s'est inquiétée de la radicalisation de la campagne et a exhorté à la «responsabilité».

Le parrain de l'accord de paix de 2007, le chef de l'État burkinabè Blaise Compaoré, est attendu samedi à Abidjan pour apaiser une «atmosphère électorale surchauffée», selon un communiqué publié par la présidence à Ouagadougou.

Les deux candidats marqueront le dernier jour de campagne vendredi par des rassemblements géants à Abidjan, potentiellement facteurs de nouveaux désordres.

L'issue du second tour reste très ouverte. Avec respectivement 38% et 32% au premier tour le 31 octobre, aucun ne peut tenir la partie pour gagnée et chacun doit séduire les électeurs      -baoulé du centre, en particulier- qui avaient choisi Henri Konan Bédié.

L'ex-président, arrivé troisième, a appelé à voter pour son allié Ouattara. Mais les reports de voix restent une inconnue majeure.