Le versement des rançons aux pirates somaliens, parachutées à bord même du bateau capturé ou plus traditionnellement contenues dans des valises transitant par les capitales d'Afrique de l'Est, réserve parfois de bien mauvaises surprises pour ces flibustiers modernes.

Le paiement des rançons constitue, avec l'abordage lui-même, le moment le plus dangereux des prises d'otage pour les marins mais aussi pour les pirates.

Mardi, cette phase délicate, susceptible de basculer en une minute à la suite de dissensions entre pirates ou d'une opération commando d'une marine étrangère, s'est semble-t-il déroulée sans encombres pour le thonier espagnol Alakrana.

L'un des chefs du groupe de pirates a affirmé à l'AFP qu'une rançon de 4 millions de dollars avait été versée, avant que le chef du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero n'annonce la libération du thonier sans donner plus de détail.

Mais le versement des rançons n'est pas toujours sans mauvaise surprise: en janvier, les quelque huit semaines de prise d'otage du superpétrolier saoudien Sirius Star avaient pris une tournure désastreuse pour une partie des pirates.

La rançon collectée, six d'entre eux s'étaient noyés lorsque, tentant de regagner la terre ferme depuis le tanker, leur embarcation avait chaviré. Une partie du butin avait également disparu.

«Leur petite embarcation était surchargée et allait trop vite (...) Les rescapés nous ont dit qu'ils craignaient une intervention d'une des marines étrangères pour tenter de les interpeller», avait expliqué à l'AFP le chef de ce groupe de pirates, Mohamed Said.

Selon des villageois, l'un des corps avait été retrouvé sur une plage avoisinante, avec quelque 150.000 dollars en poche.

Les rançons sont régulièrement parachutées depuis de petits avions sur le pont des bateaux capturés. Elles peuvent toutefois transiter par des intermédiaires, soit en Somalie ou à l'étranger, notamment Nairobi, Djibouti ou Dubaï.

Les pirates somaliens exigent le paiement des rançons en liquide, pour éviter toute trace, avec le risque certain de se voir remettre de la fausse monnaie.

Le Ponant, un trois-mâts de luxe français capturé en avril 2008, demeure ainsi gravé dans les mémoires des pirates somaliens comme l'un de leurs pires souvenirs.

Non seulement des troupes d'élites française étaient intervenues à terre juste après le versement de la rançon et avaient arrêté six pirates présumés.

Mais selon plusieurs hommes d'affaires du nord-est de la Somalie ayant requis l'anonymat, une partie de la rançon de 1,2 million de dollars (890.882 EUR) comprenait des faux billets.

«Je voulais conclure une affaire avec l'un des pirates (du Ponant) et j'ai vu que les billets étaient contrefaits. Dans une liasse, tous les billets avaient le même numéro de série», avait-il relaté à l'AFP.

Depuis ces mésaventures, les pirates ont pris des mesures: ceux du Sirius Star disposaient ainsi d'une machine à compter les billets et d'un détecteur de faux billets.

De même, ils n'acceptent que des billets de 100 et 50 dollars et ont des préférences pour certaines années de fabrication.

«Ils ne prendront pas de billets de 100 dollars de 1996 (beaucoup de billets contrefaits sont datés de 1996) et ils essaient aussi d'éviter les billets très récents, de peur qu'on ne remonte leur trace plus facilement», a expliqué à l'AFP une source somalienne impliquée dans plusieurs négociations.

Quant au montant de la rançon, il prend le plus souvent en considération les frais engagés pendant la prise d'otage: nourriture à bord, fuel pour le générateur, sacs de khat (plante euphorisante) et cigarettes.