Le président Joao Bernardo Vieira, tué par des militaires lundi à Bissau, avait été l'auteur du premier coup d'Etat de Guinée-Bissau en 1980 avant d'être renversé par des rebelles en 1999 puis de revenir au pouvoir par les urnes en 2005.

Politiquement de plus en plus isolé, progressivement lâché par une partie de l'armée, pilier du régime, affaibli par la maladie, il avait déjà échappé le 23 novembre 2008 à une tentative d'assassinat dirigée par une dizaine de soldats.Ancien électricien né à Bissau en avril 1939, le général de division «Nino» Vieira était une des figures de «la lutte de libération nationale» menée pendant 11 ans contre le Portugal, ancienne puissance coloniale de ce petit pays pauvre et instable d'Afrique de l'Ouest.

Il a suivi dès 1962 Amilcar Cabral, qui avait fondé neuf ans plus tôt le Parti africain pour l'indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert (PAIGC), et qui deviendra le héros de l'indépendance, acquise en 1974.

En novembre 1980, le premier président du pays, Luis Cabral, demi-frère d'Amilcar, est renversé par un coup d'Etat. Les putschistes sont dirigés par le Commissaire principal (Premier ministre), Nino Vieira, qui se fait élire à la présidence en 1981, puis en 1994 et 1998.

Mais, après avoir dirigé le pays d'une main de fer, l'ex-putschiste est à son tour renversé en mai 1999 à la suite d'une rébellion de onze mois conduite par le général Ansumane Mané qui plonge la Guinée-Bissau dans le chaos. Chassé du pouvoir, Vieira trouve alors refuge au Portugal.

En avril 2005, il se porte candidat à la présidentielle, malgré l'interdiction d'activité politique qui le frappe, effectuant un retour triomphal, en atterrissant en hélicoptère dans un stade de Bissau devant des milliers de sympathisants.

Il demande pardon au peuple et «souhaite que les erreurs du passé servent à bâtir ce pays et à garantir la stabilité».

Il se lance dans la course à la présidentielle en tant que candidat indépendant, sans l'appui du PAIGC, et est élu au second tour avec seulement 17 312 voix de plus que l'ex-président Kumba Yala (2000-2003).

Sans réel appui politique, relativement isolé, il change quatre fois de premier ministre en trois ans et s'absente fréquemment du pays pour se faire soigner à l'étranger, notamment à Paris, où il était encore en visite privée il y a deux semaines.

Dans le même temps, ce pays aux infrastructures défaillantes devient la plaque tournante du trafic de cocaïne sud-américaine vers l'Europe, suscitant l'inquiétude croissante de la communauté internationale et les critiques de ses opposants qui lui reprochent son profil bas face aux multiples crises.

Le 25 décembre, il est contrait de nommer au poste de premier ministre Carlos Gomes Junior, chef de l'ex-parti unique PAIGC, sorti grand vainqueur des élections législatives de novembre et avec qui il entretient de mauvaises relations.

Il effectue le 6 février sa dernière visite officielle à l'étranger, en Guinée voisine, pour participer aux cérémonies du «sacrifice du 40e jour» suivant le décès du président Lansana Conté (1984-2008), son principal allié dans la région.