Se peut-il que la controverse autour de la couverture du New Yorker fasse l'affaire de Barack Obama (après tout, son camp l'a alimentée en dénonçant la caricature haut et fort)? En tout cas, cette controverse occulte pour le moment le contenu du long article (15 000 mots) que lui consacre l'hebdomadaire dans le même numéro.

Un article qui examine les années du candidat démocrate à Chicago et qui revient notamment sur sa réaction initiale aux attentats terroristes du 11 septembre 2001. Plusieurs blogueurs et commentateurs de droite ne manqueront pas de critiquer cette réaction. Sur le site National Review Online, Byron York utilise le mot «tiède» pour la qualifier.

Je cite, par ailleurs, un passage du reportage de Lizza sur ce que le journaliste considère être le plus «grand malentendu» au sujet d'Obama, à savoir qu'il serait «une sorte de révolutionnaire anti-establishment» (merci à yvonthivierge pour la traduction) :

Le pire des préjugés concernant Barack Obama est peut-être qu'il est une espèce de révolutionnaire anti-establishment. Or, chacune des étapes de sa carrière politique a été marquée par une envie de s'adapter aux institutions en place plutôt qu'un désir de les démolir ou les remplacer. En tant qu'organisateur communautaire, il avait recours aux églises de Chicago pour effectuer son travail parce qu'elles constituaient les principaux paliers de pouvoir dans le quartier South Side. Agnostique à ses débuts, il est devenu chrétien en travaillant dans un tel milieu. À Harvard, il accéda à la présidence de la Law Review en faisant appel aux conservateurs du comité de sélection. À Springfield, la capitale, plutôt que de contester les leaders de la vieille garde du parti démocratique, il a tissé avec eux des liens mutuellement bénéfiques.

«Vous avez le pouvoir de m'aider à devenir sénateur des États-Uni», a-t-il dit en 2003 à Emil Jones, chef de file démocrate à Springfield. Pendant ses temps morts, Obama jouait au poker avec des lobbyistes et des législateurs républicains. À Washington, il a été un sénateur prudent et, dès son arrivée, a clairement signifié qu'il ne se présentait pas comme adversaire de la guerre d'Irak.

Comme bien des politiciens, Obama est paradoxal. De par sa nature, il procède par étape; il a pourtant énoncé un programme ambitieux durant un premier mandat (indépendance énergétique, système de santé universel, retrait d'Irak). Il parle beaucoup de réformer un processus politique brisé mais a toujours agi en suivant les règles existantes pas celles qu'il voudrait mettre en place. Il est un nouveau-venu qui a réussi à maîtriser le jeu des anciens. Idéologiquement, il se situe à gauche mais a parfois carrément salué les idées philosophiques de la droite."

(Photo Marc PoKempner)