Si Chris Christie était président des États-Unis, il n'hésiterait pas à instaurer une zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Syrie et à menacer d'abattre les avions russes qui oseraient s'y aventurer. Contrairement au «faible à la Maison-Blanche» - sa description de Barack Obama -, il prendrait le téléphone et dirait à Vladimir Poutine : «Ne me teste pas, car je le ferai.»

Le gouverneur du New Jersey, à la traîne dans les sondages parmi les candidats républicains à la présidence, ne succédera probablement pas à Obama. Mais sa critique de la politique du président démocrate vis-à-vis de la Syrie est répandue : par son inaction, son manque de vision stratégique et sa pusillanimité, Obama a non seulement permis au conflit syrien de s'aggraver mais également à la Russie de Poutine d'y intervenir militairement.

Le chroniqueur du New York Times Roger Cohen présente ici une critique plus subtile de la politique syrienne d'Obama, l'attribuant à une «doctrine de la retenue» plutôt qu'à la faiblesse. «Je pense qu'Obama exagère les limites et sous-estime les bons côtés de la puissance américaine», estime un expert cité par Cohen.

Mais si cette faiblesse ou cette retenue présumée était plutôt de la lucidité? Dans cet article publié aujourd'hui dans La Presse, Jocelyn Coulon, directeur du Réseau de recherche sur les opérations de paix, répond à cette question en vantant la lucidité du président américain. J'en cite un extrait :

Il est clair dans l'esprit de Barack Obama que la question syrienne est insoluble militairement, et cela, depuis le début de la guerre civile il y a quatre ans. «Ce que nous ne sommes pas parvenus à faire jusqu'à maintenant, et je suis le premier à le reconnaître, c'est de changer la dynamique à l'intérieur de la Syrie, a-t-il dit. Nous n'avons jamais entretenu l'illusion que nous pourrions nous-mêmes, par des moyens militaires, résoudre le problème à l'intérieur de la Syrie.»

Dès lors, cette lucidité stratégique lui a permis et lui permet toujours de résister aux appels constants à intervenir sur le terrain. Cette attitude est d'autant plus justifiée que les principaux acteurs de ce drame - les rebelles syriens, le régime à Damas, la Turquie, l'Arabie saoudite, la Russie, la France - ont des visées divergentes et campent souvent sur des positions aussi intransigeantes qu'irréconciliables.

Alors, faible ou lucide, Obama?