La Martinique, paralysée par une grève générale depuis une vingtaine de jours, s'est enfoncée dans la violence avec une deuxième nuit de pillages, tandis qu'une sortie de crise semblait se dessiner jeudi dans l'île voisine de Guadeloupe.

Les violences de la nuit à Fort-de-France, principale ville de l'île, auraient fait au moins deux blessés, selon un bilan officieux. Plusieurs voitures ont été incendiées, des magasins pillés et une cinquantaine de personnes interpellées.

Plusieurs témoignages recueillis sur les ondes de Radio Caraïbes Internationale (RCI) ont fait état de groupes de jeunes armés, braquant des automobilistes à l'aide d'un fusil à pompe ou à canon scié, avant de leur voler leur voiture.

Serge Letchimy, député-maire de Fort-de-France, a qualifié ces violences d'«inadmissibles» et lancé un appel au calme.

Il a aussi appelé à trouver un accord dans les 24-48 heures sur les prix et les salaires en Martinique soulignant les risques d'un «embrasement général» sur cette île touchée par une grève générale contre la vie chère depuis le 5 février.

La veille, il avait estimé que l'Etat n'avait pas pris «la mesure» de la crise.

Ces incidents surviennent au moment où un début d'accord a été trouvé en Guadeloupe, l'île antillaise voisine paralysée par une grève générale depuis le 20 janvier. La Guadeloupe avait aussi connu plusieurs nuits de violences marquées notamment par la mort d'un syndicaliste tué par balles.

L'Etat, le patronat et le collectif intersyndical LKP qui mène la grève, sont parvenus à un accord sur la principale revendication des grévistes, une hausse de 200 euros des bas salaires.

«L'Etat va garantir les 200 euros», a déclaré à la presse l'un des dirigeants de l'intersyndicale en Guadeloupe, Rosan Mounien, après plus de dix heures de discussions.

«On est habitué aux revirements du patronat, on se méfie, la grève continue», a toutefois déclaré le leader du collectif contre l'exploitation (LKP), Elie Domota.

Le préfet Nicolas Desforges a indiqué pour sa part qu'un accord définitif n'était pas signé et que les débats n'étaient pas terminés. «Nous n'avons pas totalement abouti, les discussions sont suspendues et reprendront à 14H30 (18H30 GMT)» ce jeudi, a-t-il ajouté.

Une foule importante a soutenu le LKP en chansons, au rythme des tambours, pendant toute la nuit devant la capitainerie de Pointe-à-Pitre où ces négociations marathon se déroulaient.

M. Mounien a prévenu qu'un accord définitif sur les 200 euros ne signifierait pas la fin des négociations. «Cela permettra de débuter les discussions sur les 19 derniers points à débattre», a-t-il dit.

Parmi ces points, figure la question du paiement des jours de grève.

Guadeloupe et Martinique, deux départements français d'outre-mer, accumulent les maux sociaux: le chômage y dépasse les 20%, les prix des produits de grande consommation, en majeure partie importés de France métropolitaine, sont très chers.

Le conflit social réveille des tensions raciales entre la population noire et la minorité blanche, dont les familles de «békés», descendants des colons esclavagistes, qui contrôlent une bonne partie de l'économie locale.