Adem (Oxygène), film lumineux d'un jeune cinéaste flamand atteint de fibrose kystique, a remporté hier soir le Grand Prix des Amériques du 34e Festival des films du monde de Montréal.

Le premier long métrage, sensible et pertinent, du Belge Hans Van Nuffel, 29 ans, est une incursion dans la culture commune de jeunes gens souffrant également de cette maladie génétique. Van Nuffel avait remporté le Prix du jury du FFM en 2008 pour son court métrage Fal.

Le jury, présidé par le double Palmé d'or Bille August, sacre ainsi une œuvre de fraîcheur qui tranche, malgré ses maladresses, avec le ton plus académique de l'ensemble des films de la compétition. Le palmarès du 34e FFM fait d'ailleurs la belle part aux premières œuvres et comprend son lot de surprises, bonnes et mauvaises, à l'image de sa compétition en dents de scie.

Parmi les surprises moins heureuses, on compte le Grand Prix du jury décerné au film italien Dalla Vita in poi, de Gianfranco Lazotti. Cette comédie romantique loufoque, inspirée d'une véritable correspondance entre une femme handicapée et un détenu, n'est pas sans charme, mais son intrigue est ténue, décousue, enrobée d'une musique sirupeuse, avec en prime une fin alambiquée.

Je m'explique mal le Prix de la meilleure contribution artistique récompensant Wenecja (Venise) du Polonais Jan Jakub Kolski, un film académique, peu original, fait de lourds élans poétiques et d'images esthétisantes. Et je reste surpris par le Prix de la mise en scène reçu par Pascal Elbé pour Tête de Turc, un polar rythmé et efficace, soutenu par une distribution de premier plan, dont les effets de réalisations m'ont parfois semblé maladroits et surlignés.

En revanche, ce même prix de réalisation, remis ex-aecquo à la Norvégienne Maria Sodahl pour Limbo, m'a semblé pleinement mérité. Cet autre premier long métrage est un drame psychologique fluide et subtil, d'une belle maîtrise formelle, sur l'exil, l'amour, l'infidélité et la fragilité de l'être.

Le lauréat du Prix du meilleur scénario est tout aussi méritant. De la infancia, du Mexicain Carlos Carrera, est une oeuvre inspirée, traitant de la famille dans toutes ses zones d'ombre. Une fable métaphorique ancrée dans la réalité, malgré ses séquences oniriques, fort bien interprétée et appuyée par une superbe trame musicale.

On salue également le Prix de l'innovation remis à Julie Hivon pour Tromper le silence, un film suave, intimiste et minimaliste, de tensions et d'atmosphères magnifiées par les interprètes Suzanne Clément et Maxime Dumontier.

L'autre film québécois de la compétition, Route 132 de Louis Bélanger, trouve également une place au palmarès, grâce au jeu remarquable de François Papineau, dans le rôle d'un père en déroute après la mort de son fils de 5 ans. Eri Fukatsu mérite quant à elle le Prix d'interprétation féminine pour Akunin du Japonais d'origine coréenne Lee Sang-Il.

Le grand oublié du jury est sans conteste Das Lied In Mir, à mon sens le film le plus achevé de cette compétition d'un niveau somme toute médiocre. Cet excellent premier film de Florian Cossen, un cinéaste allemand de 31 ans qui a entre autres grandi et fait des études à Montréal, pose un regard d'une grande finesse sur la dictature argentine, à travers l'histoire d'une jeune Allemande qui découvre par hasard ses origines à Buenos Aires.

Florian Cossen pourra se consoler avec le prix du jury œcuménique (qu'il partage avec Adem), le prix du public (ex-aecquo avec Pajaros de papel d'Emilio Aragon) et le prix de la critique internationale.

PALMARÈS DU 34e FFM

Grand prix des Amériques:
Adem (Oxygène) de Hans van Nuffel (Belgique/Pays-Bas)

Grand Prix spécial du jury :
Dalla Vita in Poi de Gianfrancesco Lazotti (Italie)

Prix de la mise en scène ex-aequo :
Limbo de Maria Sødahl (Norvège/Suède/Danemark/Trinité et Tobago)
Tête de Turc de Pascal Elbé (France)

Prix d'interprétation féminine :
Eri Fukatsu pour le film Akunin / Villain de Lee Sang-Il (Japon)

Prix d'interprétation masculine :
François Papineau pour le film Route 132 de Louis Bélanger (Canada)

Prix du meilleur scénario:
De la Infancia de Carlos Carrera, scénario de Silvia Pasternac, Fernando Leon, Carlos Carrera (Mexique)

Prix de l'innovation :
Tromper le silence de Julie Hivon (Canada)