Malgré le retour forcé des postiers, des membres syndiqués de Postes Canada tiennent un mouvement spontané de grève ce matin à Montréal, devant les locaux de Saint-Laurent. La présidente de la section montréalaise du STTP, Lise-Lyne Gélineau, a parlé de la « pire insulte » que les travailleurs pouvaient recevoir sur les ondes du Réseau de l'Information (RDI). Elle ne serait pas étonnée que le conseil exécutif national décide de contester la loi devant les tribunaux.

« Présentement, le conseil exécutif national va prendre la décision qui s'impose. J'imagine qu'il va y avoir une contestation de la loi, parce qu'ils nous briment réellement dans nos droits fondamentaux au niveau de la négociation », a-t-elle soutenu.

Mme  Gélineau s'est dite extrêmement déçue, estimant aussi que Postes Canada a attendu plusieurs mois et le dépôt d'un projet de loi spéciale avant de faire une offre « potable ».

Dans un communiqué, le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) a déclaré examiner toutes les options qu'il a à sa disposition pour contester la loi de retour au travail qui a été adoptée par le Sénat, en soirée, hier.

« La loi renvoie les travailleuses et travailleurs des postes aux mêmes vieux problèmes non réglés en milieu de travail, et ce, durant la période la plus occupée de l'année. Les travailleurs sont consternés et scandalisés, et avec raison, cette loi enfreint notre droit à la libre négociation collective » a dénoncé Mike Palecek, président national du STTP.

À partir de midi, les postiers devront reprendre le travail partout au pays. Hier soir,  le

Sénat a adopté le projet de loi spéciale ordonnant la fin des grèves tournantes menées par les travailleurs de Postes Canada depuis cinq semaines.

Certains sénateurs indépendants, libéraux indépendants et même certains conservateurs, sont aussi d'avis qu'il y a entorse aux droits à la négociation collective des travailleurs de Postes Canada, et ils ont voté contre le projet de loi.

Mais la majorité des sénateurs ont rejeté cette vision des choses, ou à tout le moins conclu qu'il revenait aux tribunaux, et non aux sénateurs, de déterminer la constitutionnalité de la loi.

Un amendement du sénateur indépendant Murray Sinclair, qui proposait de reporter la mise en vigueur de l'ordonnance de retour au travail pour au moins sept jours après la sanction royale, a été rejeté.

Le gouvernement de Justin Trudeau a justifié l'adoption urgente de ce projet de loi en invoquant l'impact économique des arriérés de courrier et de colis en cette période de pointe des Fêtes.

Lundi soir, la ministre du Travail, Patty Hajdu, a déclaré par communiqué que la loi spéciale était nécessaire, après avoir épuisé toutes les autres options, afin « de protéger l'intérêt public et d'éviter de nuire davantage à l'économie canadienne ».

« L'arrêt de travail de Postes Canada a eu des répercussions négatives importantes sur les Canadiens, les organismes de bienfaisance, les entreprises de toutes tailles, le commerce international, Postes Canada, ses travailleurs et leur famille. Les Canadiens et les entreprises comptent sur Postes Canada et sur ses travailleurs, surtout pendant la période la plus occupée de vente au détail », a dit la ministre.

Suite des choses : médiation et arbitrage

À la Chambre des communes, 166 députés avaient voté pour la loi spéciale et 43 contre. Les députés néo-démocrates s'y sont opposés alors qu'aucun député conservateur n'était présent au moment du vote.

La ministre du Travail avait soutenu la semaine dernière que ce projet de loi était « différent » de celui adopté par le gouvernement précédent parce qu'il n'impose pas de nouvelles conventions collectives. Il impose plutôt la médiation comme mode de règlement des différends entre Postes Canada et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, de même qu'un processus d'arbitrage si celle-ci ne porte pas fruit.

Les négociations sont en cours depuis près d'un an, mais le conflit s'est envenimé lorsque les membres du syndicat ont amorcé des grèves tournantes, le 22  octobre. Ces débrayages ciblés et successifs auraient entraîné des arriérés de courrier et de colis dans les principaux centres de tri de la société d'État à Vancouver, Toronto et Montréal.

Le syndicat demande des améliorations au chapitre des salaires et de la sécurité d'emploi, des horaires garantis pour ses 8000 facteurs ruraux et l'équité salariale pour ces travailleurs avec les 42  000 facteurs urbains de Postes Canada. Le syndicat souhaite également que Postes Canada adopte des mesures qui, à son avis, réduiraient le nombre de blessures au travail.

- Avec La Presse canadienne