(Ottawa) Le gouverneur de la Banque du Canada plaide pour que des vaccins contre la COVID-19 soient envoyés aux pays en développement dans le cadre d’une campagne plus large pour non seulement mettre fin à la pandémie, mais aussi pour soutenir la reprise économique du Canada et atténuer les pressions sur les prix des biens de consommation.

Dans un discours prononcé jeudi, Tiff Macklem a fait valoir que les vaccins sauvent des vies et des gagne-pain, en plus de soutenir la reprise économique mondiale.

Même si le développement des vaccins a été un exemple de coopération internationale à son meilleur, M. Macklem a estimé qu’on ne pouvait pas en dire autant de la garantie d’un accès équitable aux vaccins dans les pays, en particulier dans les pays en développement.

La COVID-19 est le plus grand risque sanitaire et économique auquel le monde est confronté, et les gouvernements et le secteur privé doivent collaborer pour rendre les vaccins accessibles à tous, a affirmé M. Macklem dans le texte de son discours à l’organisme américain Council on Foreign Relations.

Au pays, des dizaines de millions de doses ont été livrées et injectées dans la dernière année, de sorte que plus de 82 % des Canadiens admissibles de 12 ans et plus sont maintenant pleinement vaccinés.

Mais on ne peut pas en dire autant des autres parties du monde, en particulier dans les économies émergentes, et les régions du monde dont dépend le Canada pour ses biens.

Un impact sur l’inflation

Les éclosions en cours dans d’autres parties du monde affectent les chaînes d’approvisionnement qui, à leur tour, ont un impact sur les stocks de biens de consommation en demande, la livraison des pièces nécessaires pour construire des biens comme des véhicules automobiles au pays, et les coûts de transport.

Tout cela fait grimper les prix à la consommation d’ensemble.

« Nous avons l’impression que nous sortons de la pandémie, mais il est important de se rappeler que de grandes parties du reste du monde sont toujours aux prises avec la pandémie », a observé Craig Alexander, économiste en chef de Deloitte Canada.

« Une partie de l’histoire de l’inflation qui se déroule actuellement, qui voit l’inflation s’accélérer, une partie de cela est en fait le reflet de la pandémie en cours à l’extérieur du Canada. »

L’inflation annuelle dépasse la zone de confort de la Banque du Canada depuis avril, et a atteint 4,1 % en août. La banque centrale s’attend à des lectures élevées au-dessus de sa cible, qui vise environ 2,0 %, pour le reste de l’année.

Selon M. Macklem, les pressions inflationnistes devraient s’atténuer, d’une part parce que les prix ne sont plus comparés aux plus bas observés au début de la pandémie, et d’autre part avec la disparition progressive des goulots d’étranglement. Mais ces derniers se révèlent plus persistants qu’on ne l’a d’abord cru, et pourraient aussi conduire à des lectures d’inflation plus élevées, a-t-il précisé.

« Cette pandémie continue de nous jouer des tours », a-t-il affirmé aux journalistes après son discours.

« Cela pourrait prendre un peu plus de temps, mais nous continuons de croire qu’il y a de bonnes raisons pour affirmer que l’impact de ces perturbations d’approvisionnement sur l’inflation devrait être temporaire, et qu’il y a de bonnes raisons de croire que l’économie, la reprise, reprendra et se poursuivra. »

Néanmoins, il a précisé que la banque centrale surveillerait de près les signes indiquant que les facteurs temporaires deviennent plus permanents, notant que sa « marge d’erreur sur l’inflation est réduite ».

Un premier voyage international

M. Macklem a également indiqué que des discussions sur la résolution de ces problèmes mondiaux devraient avoir lieu lors de son voyage, la semaine prochaine, à Washington, D. C. Il s’agira de son premier voyage international depuis qu’il a pris la tête de la Banque du Canada, au début de la pandémie.

M. Macklem devrait assister aux réunions annuelles du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, ainsi qu’à des rencontres avec ses homologues du G7 et du G20.

Dans son discours, M. Macklem a évoqué la nécessité, pour le système financier mondial, de proposer une voie de sortie de la pandémie qui concilie les impératifs les plus pressants à court terme et les fondements pour la prospérité à long terme, comme la transition vers des économies carboneutres.

Cette approche équilibrée était encore plus essentielle aujourd’hui, a-t-il affirmé, alors que les banques centrales se préparent à mettre fin aux programmes de relance économique — ce qui pourrait entraîner une accumulation des pressions sur le système financier mondial.

La Banque du Canada a déjà commencé à atténuer l’un des principaux programmes de relance mis en place au début de la pandémie, en réduisant ses achats hebdomadaires d’obligations fédérales.

Ce programme d’assouplissement quantitatif vise à réduire les taux d’intérêt sur divers emprunts, des prêts hypothécaires aux prêts aux entreprises, mais pourrait bientôt passer à une phase où il n’a plus d’effet stimulant et ne sert plus qu’à maintenir ce qui est déjà en place.

De même, le taux d’intérêt directeur de la banque centrale est resté à 0,25 % depuis le début de la pandémie, ce que la banque centrale considère comme sa valeur plancher, où il devrait rester jusqu’au second semestre de l’année prochaine. La Banque du Canada prévoit que l’économie se sera alors suffisamment rétablie pour soutenir des taux d’intérêt plus élevés.