L'horreur pure. La police croit que les morceaux de cadavre envoyés à des partis politiques cette semaine sont l'oeuvre d'un acteur porno sadique installé à Côte-des-Neiges. L'adepte de cinéma aurait tué sa victime dans une mise en scène élaborée, filmée et diffusée sur l'internet.

Luka Rocco Magnotta, anciennement connu sous le nom d'Eric Clinton Newman, fait maintenant l'objet d'un mandat d'arrêt pancanadien. Des policiers de partout au Canada aideront à vérifier la moindre piste à son sujet. Selon nos sources, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) travaille notamment à valider des informations selon lesquelles l'homme de 29 ans aurait fréquenté la célèbre tueuse Karla Homolka.

«L'aide du public peut nous être précieuse dans un dossier comme celui-ci», a souligné le commandant Ian Lafrenière, au moment de divulguer la photo de l'acteur recherché.

Rappelons que mardi, le concierge d'un immeuble de Côte-des-Neiges a découvert un torse d'homme sans tête ni jambes à l'intérieur d'une valise abandonnée depuis quelques jours dans un amoncellement d'ordures.

La même journée, un colis postal contenant un pied tranché a été reçu au siège social du Parti conservateur, à Ottawa. Une main tranchée a ensuite été découverte dans un autre colis au centre de tri de Postes Canada à Ottawa. Elle était destinée au Parti libéral du Canada. Les deux colis ont été expédiés de Montréal. Le SPVM affirme que «des éléments concrets» laissent croire que tous les membres de cadavre proviennent de la même victime. Seule une expertise pathologique pourra toutefois le confirmer avec certitude.

Sang dans le lit

Les enquêteurs montréalais ont exploré l'immeuble à logements miteux de la Place Lucy, près du boulevard Décarie, à proximité duquel le torse avait été découvert. Rapidement, leur attention s'est tournée vers un petit appartement loué depuis quelques mois au nom d'un certain Rocco Magnotta, introuvable depuis mercredi.

Lorsqu'ils ont pénétré dans l'appartement 208, le couloir a été envahi d'une odeur de putréfaction. «Ça sentait le diable là-dedans», raconte en grimaçant Richard Payette, qui habite de l'autre côté du couloir.

Le lit installé dans le minuscule logement était maculé de sang.

Puis, mercredi matin, un policier joint par La Presse a laissé entendre que les pires détails étaient à venir. «Nous semblons avoir affaire à un crisse de malade» a-t-il laissé tomber, sous le choc.

Ses collègues venaient de découvrir une vidéo qui circulait sur au moins un site web spécialisé en horreur et qui aurait été réalisée par le suspect. Les images, insoutenables, correspondent exactement au crime.

On y voit que le suspect semble d'abord reproduire avec une écharpe blanche et un pic à glace une scène du thriller érotique Basic Instinct, dans lequel une séductrice assassine à coups de pic à glace son partenaire sexuel. Une affiche du film Casablanca orne le mur à l'arrière.

La vidéo se poursuit avec de scènes de mutilation et d'actes sexuels si morbides que certains policiers pourtant endurcis ont été incapables de les regarder. L'homme semble s'adonner au cannibalisme ou faire semblant de s'y adonner. Un animal, peut-être un chien, apparaît brièvement dans le champ de la caméra. Le tout se déroule avec comme trame sonore la chanson True Faith du groupe New Order. Cette pièce musicale a été utilisée dans une scène célèbre du film American Psycho, qui relate l'histoire d'un psychopathe assassin.

L'aide du FBI a été requise pour traiter du cas du site web qui a publié les images il y a moins d'une semaine.

Outre le pied, la main et le torse, les enquêteurs auraient retrouvé au cours de fouilles d'autres restes humains. Il n'était pas clair si les découvertes ont été faites dans l'appartement ou parmi le gros amoncellement d'ordures qui a été passé au peigne fin dans la ruelle.

À ce stade de l'enquête, la police refuse de divulguer quelles parties du corps sont toujours manquantes. Elle n'écarte pas la possibilité que le suspect ait envoyé d'autres colis par voie postale. Postes Canada travaille avec la police afin d'éclaircir cet aspect du mystère.





Des connaissances?

Les enquêteurs croient savoir qui est la victime dans cette affaire, mais ils refusent de divulguer son identité pour le moment. Ils ont vite noté qu'un autre résidant du secteur a disparu depuis quelques jours. Il pourrait avoir rencontré le suspect et s'être rendu chez lui volontairement.

«Il est fort probable que le suspect connaissait sa victime», s'est borné à dire le commandant Lafrenière à ce sujet.

Au Québec, ni le suspect ni celui qu'on croit être la victime n'ont d'antécédents judiciaires.

Les résidants de l'immeuble où se serait produit le crime parlent de Magnotta comme d'une personne discrète qui vivait seule sans déranger le voisinage. Il louait son logement 490$ par mois et aurait dit vouloir jouer dans des films qui ne sont pas pornographiques.

De nombreux habitués du coin ont souligné à quel point l'édifice, en bordure du boulevard Décarie, abrite son lot d'éclopés et de toxicomanes. Plusieurs résidants ont été rencontrés par les policiers et ont grandement aidé à la progression de l'enquête.

Mais aucune information n'a permis jusqu'ici de mettre les policiers sur la piste du fugitif, devenu maintenant le plus recherché au Canada.

En fin de soirée, le réseau CTV affirmait qu'un note a été trouvée avec le pied coupé aux bureaux du Parti conservateur. Le texte indiquerait que d'autres morceaux de corps ont été envoyés par la poste et que l'auteur a l'intention de tuer à nouveau.