Quand elle a vu la photo de son ancien élève Alexandre Bissonnette apparaître à la télévision le soir du 29 janvier 2017, Lucie Côté s'est mise à pleurer.

« Quand j'ai vu ça aux nouvelles le soir du drame, je n'y croyais pas. Ça ne se peut pas, Alexandre c'est un ti-minou tout doux, a raconté Mme Côté à la Cour supérieure. C'est impossible ! Je pensais que c'était un autre. Quand sa face est apparue à la télé, je me suis mise à pleurer. C'est tellement triste. »

Lucie Côté a été présentée lundi comme première témoin de la défense aux débats sur la peine du tueur de la grande mosquée de Québec. L'enseignante à la retraite a enseigné à Bissonnette en secondaire deux et quatre, aux écoles des Grandes-Marées et Les Compagnons-de-Cartier.

La dame a contacté la défense pour lui demander de témoigner. « J'ai décidé de venir par moi-même. Après les événements, je me couchais le soir et mon coeur battait jusqu'à mon cerveau. Après tout ce qu'Alexandre a enduré, je me disais je ne peux pas me taire, j'aurais dû, j'aurais dû, j'aurais dû intervenir davantage. »

Elle a décrit dans son témoignage le quotidien d'une jeune victime d'intimidation : les jeunes qui s'en prennent à lui, qui font revoler son cartable dans les couloirs, qui lui donnent des coups d'épaule, qui se moquent de lui quand il intervient en classe.

« Alexandre n'était pas le seul à se faire intimider, il y avait d'autres élèves, mais à des degrés moindres. Alexandre, lui, mangeait de la chnoute », a raconté Mme Côté.

Les choses se sont tellement envenimées que la professeure a décidé d'intervenir en classe. Un matin, en secondaire 4, Alexandre Bissonnette était absent.

« Je me suis dit c'est ce matin-là que ça se passe. Moi, j'étais décrite comme une prof sévère, mais juste. Mes élèves ont su ma façon de penser. Je leur ai dit: "Ce matin on prend une demi-heure pour parler d'Alexandre" », a raconté Lucie Côté.

« Je leur ai demandé de se fermer les yeux. Et je leur ai demandé de visualiser toutes les choses négatives qu'ils faisaient à Alexandre : coup d'épaule, jambette, coup sur le cartable... Dites-moi si vous étiez à la place d'Alexandre, comment vous vous sentiriez. »

Elle a raconté au juge François Huot que les choses s'étaient améliorées pendant une dizaine de jours. Puis l'intimidation avait recommencé.

« Alexandre n'était pas un monstre. C'est un jeune avec lequel j'ai aimé marcher sur la même planète. Quand j'ai vu ce mot-là [NDLR: monstre] apparaître dans les journaux... »

L'ancienne prof de français a demandé au juge d'être clément. « Je ne veux pas qu'on soit dans un contexte de vengeance. Je veux qu'on soit dans un contexte de justice. »

La défense va faire entendre ses témoins cette semaine, jusqu'à jeudi normalement. La peine de l'auteur de l'attentat à la grande mosquée, qui a fait six morts et cinq blessés graves, sera connue en juin.