Un râteau, de l’essence, du bois et beaucoup d’eau de Javel. La femme de Saint-Jude accusée d’avoir fait disparaître des corps pour la mafia avec son conjoint a été enregistrée par la police alors qu’elle expliquait comment elle s’y était prise pour faire un gros ménage après un évènement marquant. « On savait nettoyer », a-t-elle laissé tomber.

L’enregistrement a été joué devant le jury mardi, au procès de Marie-Josée Viau et de Guy Dion. Le couple est accusé de complot et de participation aux meurtres des frères Vincenzo et Giuseppe Falduto, morts le 30 juin 2016.

Selon la thèse de la poursuite, un tueur à gages de la mafia aurait éliminé les deux frères dans le garage du couple en Montérégie. Marie-Josée Viau et Guy Dion auraient ensuite brûlé les corps pendant des heures et fait disparaître toute trace du crime.

Deux ans et demi plus tard, le tueur à gages, dont l’identité est protégée par un interdit de publication, a décidé de collaborer avec la police et de porter un micro. Il est devenu un agent civil d’infiltration (ACI) pour la Sûreté du Québec.

« Tu comprends même pas tout ce qu’on a fait »

Mardi, la procureure de la Couronne Isabelle Poulin a fait jouer en cour un premier enregistrement réalisé par l’ACI lors d’une rencontre « fortuite » avec Marie-Josée Viau au restaurant La Belle Province de Saint-Basile, où elle travaillait en 2019.

Au début de la conversation, Marie-Josée Viau se plaint d’avoir travaillé fort dans le cadre d’un évènement stressant dont l’ACI semble avoir connaissance, et pour lequel elle n’a pas été payée.

« On n’a rien eu. Rien, fucking e-rien », s’insurge-t-elle.

« On savait nettoyer. C’est correct », dit-elle aussi.

Elle dit avoir « tout brûlé » en utilisant plusieurs « gallons de gaz ». Elle explique avoir dû couper tous les arbres chez elle, en plein milieu de la nuit, « pour que ça brûle ».

« J’ai tout passé le bois. J’avais pu de bois », dit-elle.

« Tu comprends même pas tout ce qu’on a fait. Avec un râteau, tabarnak ! », lance-t-elle en riant.

Elle parle ensuite d’avoir utilisé de grandes quantités d’eau de Javel, au point où les yeux de son conjoint brûlaient. Et ce n’était pas tout. « Hey, imagines-tu ? On a gratté deux pieds du terrain à cette place-là. Pis on a tout été crisser ça dans la rivière », explique-t-elle.

« Tout a été gratté. Tu sais-tu combien de lames j’ai passées juste pour détruire le stock ? », demande-t-elle à sa connaissance, sans savoir qu’elle est enregistrée.

La femme avoue avoir eu peur de répercussions à la suite de cette affaire. « Ma famille se sont toutes ramassés en dedans à cause de ce genre de choses là », dit-elle.

Débrouillarde

Elle revient plusieurs fois sur le fait que son conjoint et elle n’ont pas été payés. Pendant la conversation, elle dit avoir besoin d’argent, que ses cartes de crédit sont pleines et qu’elle cumule les emplois. Elle fait de la comptabilité, de l’inspection en bâtiment et travaille à La Belle Province la fin de semaine, dit-elle.

Sur l’enregistrement, Marie-Josée Viau se dit contente d’être encore en vie, malgré tout. « C’est parce que je suis débrouillarde, là. On se le cachera pas, je suis débrouillarde. »

Le procès se poursuit toute la semaine au Centre de services judiciaires Gouin, à Montréal, devant le juge de la Cour supérieure Éric Downs.